Un des obstacles principaux à la démocratie dans de nombreux
pays d’Afrique est l’impunité dont jouissent les responsables de l’Etat, qu’ils
soient hommes politiques, fonctionnaires ou militaires…
L’impunité règne
grâce à la solidarité entre les profiteurs du système qui se couvrent
mutuellement, jusqu’à contaminer l’armée ou le système judiciaire. Il est moins grave pour un ministre de
détourner 3 millions de dollars que pour un enfant des rues d’être pris à
chaparder une boite de biscuits au marché. Ce dernier peu y laisser sa peau…
Cela ne signifie pas que certaines autorités ne cherchent pas à lutter contre
la corruption ou les violences physiques contre les populations, mais elles
sont souvent impuissantes devant la collusion entre les services de l’Etat. En
outre, quand un coupable est arrêté, il a souvent suffisamment de moyens pour
ne pas croupir longtemps en prison. Il est aussi choquant de voir à quelle
durée d’incarcération est condamné un militaire condamné pour avoir favorisé
ou pratiqué pillages, viols et tortures,
particulièrement sur des femmes. Cette banalisation du mal frise la prime à
l’encouragement et montre comment les femmes sont considérées.
Cette impunité s’accompagne souvent d’impudeur. Car ce n’est pas parce qu’on a été dénoncé par la
radio, un journal ou une ONG qu’on se privera de plastronner en public et de
continuer à trouver d’autres moyens pour s’enrichir. Il arrive même que quelqu’un
qui a été dégommé pour corruption dans un poste subalterne se retrouve peu de
temps après à un échelon supérieur, grâce à ses relations. C’est ce qui choque
le plus ceux qui se battent pour leur survie et ne font plus confiance à
l’Etat.
L’impudeur atteint l’impudence
lorsque les profits mal acquis s’étalent au grand jour sous forme de voitures
coûteuses ou de villas de luxe
construites en payant des salaires illégaux. Elle est l’expression du mépris de la protestation de populations appauvries
réduites à l’impuissance.
Il y aurait de quoi se décourager s’il n’y avait pas de plus
en plus d’associations de défense des droits humains qui se lèvent pour
condamner ces abus. On connaît les grandes réseaux internationaux comme Amnesty International, Global
Witness ou Human Right Watch… Mais il y aussi toutes sortes de radios
associatives ou diocésaines, des groupes de juristes soutenus par des diocèses, le Conseil de l’Europe ou Misereor (organisme
de l’Eglise catholique en Allemagne qui soutient de nombreux projets de
développement en Afrique), qui sont les voix des personnes sans voix. Ces réseaux de défense des droits humains sont
tenus informés par de multiples militants qui, grâce au téléphone portable et à l’internet, peuvent envoyer
comptes-rendus et photos en temps réel. Le jour où l’Afrique bénéficiera d’une
bonne couverture internet, la mobilisation citoyenne sera plus rapide et dangereusement
efficace.
Les évêques d’Afrique réunis en Synode à Rome au mois
d’octobre 09 ont fortement insisté sur la nécessité de soutenir les moyens de
communication et les réseaux de radios chrétiennes. En effet, certaines ont
pris de vrais risques en temps de guerre au nom du refus de l’in justice.
Bernard Ugeux
12 mars 10