lundi 30 août 2021

Impunité, impudeur et impudence (30/08/2021)


Un des obstacles principaux à la démocratie dans de nombreux pays d’Afrique est l’impunité dont jouissent les responsables de l’Etat, qu’ils soient hommes politiques, fonctionnaires ou militaires…

L’impunité règne grâce à la solidarité entre les profiteurs du système qui se couvrent mutuellement, jusqu’à contaminer l’armée ou le système judiciaire.  Il est moins grave pour un ministre de détourner 3 millions de dollars que pour un enfant des rues d’être pris à chaparder une boite de biscuits au marché. Ce dernier peu y laisser sa peau… Cela ne signifie pas que certaines autorités ne cherchent pas à lutter contre la corruption ou les violences physiques contre les populations, mais elles sont souvent impuissantes devant la collusion entre les services de l’Etat. En outre, quand un coupable est arrêté, il a souvent suffisamment de moyens pour ne pas croupir longtemps en prison. Il est aussi choquant de voir à quelle durée d’incarcération est condamné un militaire condamné pour avoir favorisé ou  pratiqué pillages, viols et tortures, particulièrement sur des femmes. Cette banalisation du mal frise la prime à l’encouragement et montre comment les femmes sont considérées.

Cette impunité s’accompagne souvent d’impudeur. Car ce n’est pas parce qu’on a été dénoncé par la radio, un journal ou une ONG qu’on se privera de plastronner en public et de continuer à trouver d’autres moyens pour s’enrichir. Il arrive même que quelqu’un qui a été dégommé pour corruption dans un poste subalterne se retrouve peu de temps après à un échelon supérieur, grâce à ses relations. C’est ce qui choque le plus ceux qui se battent pour leur survie et ne font plus confiance à l’Etat.

L’impudeur atteint l’impudence lorsque les profits mal acquis s’étalent au grand jour sous forme de voitures coûteuses ou  de villas de luxe construites en payant des salaires illégaux. Elle est l’expression du  mépris de la protestation de populations appauvries réduites à l’impuissance.

Il y aurait de quoi se décourager s’il n’y avait pas de plus en plus d’associations de défense des droits humains qui se lèvent pour condamner ces abus. On connaît les grandes réseaux  internationaux comme Amnesty International, Global Witness ou Human Right Watch… Mais il y aussi toutes sortes de radios associatives ou diocésaines, des groupes de juristes soutenus par des diocèses,  le Conseil de l’Europe ou Misereor (organisme de l’Eglise catholique en Allemagne qui soutient de nombreux projets de développement en Afrique), qui sont les voix des personnes sans voix. Ces  réseaux de défense des droits humains sont tenus informés par de multiples militants qui, grâce au téléphone  portable et à l’internet, peuvent envoyer comptes-rendus et photos en temps réel. Le jour où l’Afrique bénéficiera d’une bonne couverture internet, la mobilisation citoyenne sera plus rapide et dangereusement efficace.

Les évêques d’Afrique réunis en Synode à Rome au mois d’octobre 09 ont fortement insisté sur la nécessité de soutenir les moyens de communication et les réseaux de radios chrétiennes. En effet, certaines ont pris de vrais risques en temps de guerre au nom du refus de l’in justice.

Bernard Ugeux

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