mardi 24 août 2021

Au fond de tout être blessé, on peut trouver un éclair d’espoir (24 aout 2021)

 

Une association aide des femmes de la campagne, éteintes par les épreuves, à se reconstruire en s’entraidant à puiser dans leur force vitale.

Les regards sont brillants dans les visages concentrés et attentifs des femmes assises en cercle dans le hangar couvert de toiles  de survie bleutées. Elles échangent avec gravité tandis qu’un éclat de rire illumine leurs yeux quand l’une d’entre elles raconte un exemple concret qui fait mouche à propos de leurs difficultés quotidiennes. Elles se réunissent régulièrement pour parler de leur vie et échanger sur d’éventuels projets d’avenir. Elles ont été sélectionnées en fonction des épreuves qu’elles ont traversées récemment sur ce large plateau d’altitude entouré de montagnes grandioses. Elles ont perdu leur mari ou leurs enfants, leur habitation  a été détruite et  leurs biens volés ou elles ont été victimes de violences sexuelles. Elles sont habillées pauvrement, mais avec dignité. Certaines allaitent, d’autres sont enceintes, toutes sortent d’un cauchemar qui ne les a pas laissées indemnes.

Les deux animateurs (appelés facilitateurs)  – un homme et une femme formés à cet effet –les accompagnent sur un chemin de reconstruction. Contrairement à tant d’ONG qui se contentent de distribuer de la nourriture ou des outils sans autre forme d’accompagnement, l’association Action d’espoir a pour premier objectif de les encourager à espérer à nouveau dans la vie. Elle s’appuie sur la conviction qu’au fond de la personne la plus blessée, il reste encore un peu de force vitale sur laquelle s’appuyer afin de se réconcilier avec soi-même et avec la vie. A ces femmes qui ont erré si longtemps sans aucun espoir et qui ont parfois perdu toute estime de soi et toute motivation pour prendre une quelconque initiative, elle révèle qu’elles peuvent s’appuyer sur ce mince filet de vie grâce auquel elles sont là, aujourd’hui, en quête d’un avenir meilleur.

C’est tout au long d’un patient travail d’écoute que les facilitateurs amènent ces femmes à découvrir en elles des raisons de continuer à vivre et des ressources vitales pour s’engager dans un nouveau projet de vie. C’est souvent sur les valeurs de relation, de solidarité et sur l’amour de leurs enfants qu’elles s’appuient. Sans référence religieuse explicite – mais elles sont toutes croyantes – Action d’espoir participe à un travail de résurrection. Le nombre de personnes rejointes est limité et le travail demande plusieurs mois d’investissement, mais chaque femme remise debout, c’est une famille qui recommence à exister et à participer à la vie du pays.

L’intérêt de les réunir en groupe repose sur la nécessité de reconstruire les solidarités et de favoriser une interaction positive entre elles dont la confiance a été détruite par les horreurs dont elles ont été témoins ou victimes. Car, dans ce cas, le réflexe est le repli sur soi et la perte de confiance en tout être humain. Les croyances les plus enracinées ont été ébranlées. Le traumatisme psychique et physique entraîne une peur et une méfiance par rapport à tout risque d’être à nouveau agressée ou déçue par les autres.

Cette méfiance se perçoit dans l’échange qui porte en ce moment sur l’utilisation du microcrédit proposé par l’association. Il peut les sortir de la dépendance et leur rendre progressivement une autonomie économique au lieu de les maintenir dans l’inertie ou l’assistance. Mais l’échange est grave et vif, car prendre un crédit, c’est risquer d’échouer. Accepter de faire partie d’un groupe de bénéficiaires du crédit – jamais donné individuellement – c’est risquer d’être trompée par les autres, surtout si on est la responsable du groupe et qu’on doit veiller au remboursement à échéance. Et qui s’occupera du crédit quand elle sera à la maternité ? Parce qu’elles savent bien que certaines d’entre elles ne sont pas assez motivées, ou fiables. Qu’il y en a qui disparaissent et qui parfois changent de nom pour s’adresser une autre association moins exigeante sur le plan de la responsabilité personnelle.

C’est ici que les facilitateurs leur expliquent que l’association ne les lâchera pas, qu’on peut retarder l’échéance pour celles qui n’y arrivent pas, que le but est de les accompagner petit à petit sans les forcer. Qu’elles ont le droit à l’erreur pourvu qu’elles fassent ce qu’elles peuvent. Ce crédit peut être utilisé pour commencer un petit commerce, ou un élevage ou du maraichage…  Il oscille au départ entre 10 et 50 $ (soit entre 8 et 40 €). Il peut augmenter par la suite, mais les risques sont limités au début et certaines arrivent à doubler la mise en trois semaines. Elles sont souvent courageuses et débrouillardes. Pour les aider aller plus loin, des sessions d’alphabétisation sont proposées et j’ai été impressionné par leur sérieux et leur joie, lorsqu’elles réussissent à écrire toutes seules leur nom ! Un animateur disait avec humour : c’est pour quand il y aura une banque dans la montagne.

Une autre source de résistance est l’attitude du mari pour celles qui ne sont pas veuves ou qui se sont remises en ménage. Les unes disent qu’il ne faut surtout pas qu’ils sachent car plusieurs d’entre elles se sont fait voler le prêt par leur mari qui a tout dépensé en boissons. D’autres disent que ce n’est pas bien de prendre un prêt sans en parler au conjoint. Une autre explique que son mari est d’accord et la soutient.  Il ne s’agit donc pas seulement d’entrouvrir un nouvel avenir pour chaque femme concernée, mais on touche ici à la vie du couple,  à la soumission et à la domination traditionnelles des femmes par des maris qui souvent les exploitent. C’est pourquoi il est parfois nécessaire que les facilitateurs les visitent à la maison et expliquent au mari l’objectif du prêt et le bénéfice que toute la famille en retirera à la longue.

C’est ainsi qu’à partir des drames que traversent ces régions toujours menacées par de nouveaux conflits, un espoir est un train de naître. Des femmes et des familles se reconstruisent, certaines se libèrent de dépendances pernicieuses et une population entre dans un processus de réhabilitation. Cela laisse espérer que demain se prépare déjà, qu’un renouveau est possible, car une poignée de personnes convaincues et bien formées, encouragées par d’autres qui les soutiennent efficacement d’au-delà des mers, croient que du mal, malgré tout, peut naître un bien…

Tout cela évoque Noël qui approche…. et les chorales qui sont en effervescence dans les villages nous le rappellent, même s’il n’y aura pas de réveillon... mais l’espérance sera célébrée.

 

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