lundi 30 août 2021

Impunité, impudeur et impudence (30/08/2021)


Un des obstacles principaux à la démocratie dans de nombreux pays d’Afrique est l’impunité dont jouissent les responsables de l’Etat, qu’ils soient hommes politiques, fonctionnaires ou militaires…

L’impunité règne grâce à la solidarité entre les profiteurs du système qui se couvrent mutuellement, jusqu’à contaminer l’armée ou le système judiciaire.  Il est moins grave pour un ministre de détourner 3 millions de dollars que pour un enfant des rues d’être pris à chaparder une boite de biscuits au marché. Ce dernier peu y laisser sa peau… Cela ne signifie pas que certaines autorités ne cherchent pas à lutter contre la corruption ou les violences physiques contre les populations, mais elles sont souvent impuissantes devant la collusion entre les services de l’Etat. En outre, quand un coupable est arrêté, il a souvent suffisamment de moyens pour ne pas croupir longtemps en prison. Il est aussi choquant de voir à quelle durée d’incarcération est condamné un militaire condamné pour avoir favorisé ou  pratiqué pillages, viols et tortures, particulièrement sur des femmes. Cette banalisation du mal frise la prime à l’encouragement et montre comment les femmes sont considérées.

Cette impunité s’accompagne souvent d’impudeur. Car ce n’est pas parce qu’on a été dénoncé par la radio, un journal ou une ONG qu’on se privera de plastronner en public et de continuer à trouver d’autres moyens pour s’enrichir. Il arrive même que quelqu’un qui a été dégommé pour corruption dans un poste subalterne se retrouve peu de temps après à un échelon supérieur, grâce à ses relations. C’est ce qui choque le plus ceux qui se battent pour leur survie et ne font plus confiance à l’Etat.

L’impudeur atteint l’impudence lorsque les profits mal acquis s’étalent au grand jour sous forme de voitures coûteuses ou  de villas de luxe construites en payant des salaires illégaux. Elle est l’expression du  mépris de la protestation de populations appauvries réduites à l’impuissance.

Il y aurait de quoi se décourager s’il n’y avait pas de plus en plus d’associations de défense des droits humains qui se lèvent pour condamner ces abus. On connaît les grandes réseaux  internationaux comme Amnesty International, Global Witness ou Human Right Watch… Mais il y aussi toutes sortes de radios associatives ou diocésaines, des groupes de juristes soutenus par des diocèses,  le Conseil de l’Europe ou Misereor (organisme de l’Eglise catholique en Allemagne qui soutient de nombreux projets de développement en Afrique), qui sont les voix des personnes sans voix. Ces  réseaux de défense des droits humains sont tenus informés par de multiples militants qui, grâce au téléphone  portable et à l’internet, peuvent envoyer comptes-rendus et photos en temps réel. Le jour où l’Afrique bénéficiera d’une bonne couverture internet, la mobilisation citoyenne sera plus rapide et dangereusement efficace.

Les évêques d’Afrique réunis en Synode à Rome au mois d’octobre 09 ont fortement insisté sur la nécessité de soutenir les moyens de communication et les réseaux de radios chrétiennes. En effet, certaines ont pris de vrais risques en temps de guerre au nom du refus de l’in justice.

Bernard Ugeux

12 mars 10

mardi 24 août 2021

Au fond de tout être blessé, on peut trouver un éclair d’espoir (24 aout 2021)

 

Une association aide des femmes de la campagne, éteintes par les épreuves, à se reconstruire en s’entraidant à puiser dans leur force vitale.

Les regards sont brillants dans les visages concentrés et attentifs des femmes assises en cercle dans le hangar couvert de toiles  de survie bleutées. Elles échangent avec gravité tandis qu’un éclat de rire illumine leurs yeux quand l’une d’entre elles raconte un exemple concret qui fait mouche à propos de leurs difficultés quotidiennes. Elles se réunissent régulièrement pour parler de leur vie et échanger sur d’éventuels projets d’avenir. Elles ont été sélectionnées en fonction des épreuves qu’elles ont traversées récemment sur ce large plateau d’altitude entouré de montagnes grandioses. Elles ont perdu leur mari ou leurs enfants, leur habitation  a été détruite et  leurs biens volés ou elles ont été victimes de violences sexuelles. Elles sont habillées pauvrement, mais avec dignité. Certaines allaitent, d’autres sont enceintes, toutes sortent d’un cauchemar qui ne les a pas laissées indemnes.

Les deux animateurs (appelés facilitateurs)  – un homme et une femme formés à cet effet –les accompagnent sur un chemin de reconstruction. Contrairement à tant d’ONG qui se contentent de distribuer de la nourriture ou des outils sans autre forme d’accompagnement, l’association Action d’espoir a pour premier objectif de les encourager à espérer à nouveau dans la vie. Elle s’appuie sur la conviction qu’au fond de la personne la plus blessée, il reste encore un peu de force vitale sur laquelle s’appuyer afin de se réconcilier avec soi-même et avec la vie. A ces femmes qui ont erré si longtemps sans aucun espoir et qui ont parfois perdu toute estime de soi et toute motivation pour prendre une quelconque initiative, elle révèle qu’elles peuvent s’appuyer sur ce mince filet de vie grâce auquel elles sont là, aujourd’hui, en quête d’un avenir meilleur.

C’est tout au long d’un patient travail d’écoute que les facilitateurs amènent ces femmes à découvrir en elles des raisons de continuer à vivre et des ressources vitales pour s’engager dans un nouveau projet de vie. C’est souvent sur les valeurs de relation, de solidarité et sur l’amour de leurs enfants qu’elles s’appuient. Sans référence religieuse explicite – mais elles sont toutes croyantes – Action d’espoir participe à un travail de résurrection. Le nombre de personnes rejointes est limité et le travail demande plusieurs mois d’investissement, mais chaque femme remise debout, c’est une famille qui recommence à exister et à participer à la vie du pays.

L’intérêt de les réunir en groupe repose sur la nécessité de reconstruire les solidarités et de favoriser une interaction positive entre elles dont la confiance a été détruite par les horreurs dont elles ont été témoins ou victimes. Car, dans ce cas, le réflexe est le repli sur soi et la perte de confiance en tout être humain. Les croyances les plus enracinées ont été ébranlées. Le traumatisme psychique et physique entraîne une peur et une méfiance par rapport à tout risque d’être à nouveau agressée ou déçue par les autres.

Cette méfiance se perçoit dans l’échange qui porte en ce moment sur l’utilisation du microcrédit proposé par l’association. Il peut les sortir de la dépendance et leur rendre progressivement une autonomie économique au lieu de les maintenir dans l’inertie ou l’assistance. Mais l’échange est grave et vif, car prendre un crédit, c’est risquer d’échouer. Accepter de faire partie d’un groupe de bénéficiaires du crédit – jamais donné individuellement – c’est risquer d’être trompée par les autres, surtout si on est la responsable du groupe et qu’on doit veiller au remboursement à échéance. Et qui s’occupera du crédit quand elle sera à la maternité ? Parce qu’elles savent bien que certaines d’entre elles ne sont pas assez motivées, ou fiables. Qu’il y en a qui disparaissent et qui parfois changent de nom pour s’adresser une autre association moins exigeante sur le plan de la responsabilité personnelle.

C’est ici que les facilitateurs leur expliquent que l’association ne les lâchera pas, qu’on peut retarder l’échéance pour celles qui n’y arrivent pas, que le but est de les accompagner petit à petit sans les forcer. Qu’elles ont le droit à l’erreur pourvu qu’elles fassent ce qu’elles peuvent. Ce crédit peut être utilisé pour commencer un petit commerce, ou un élevage ou du maraichage…  Il oscille au départ entre 10 et 50 $ (soit entre 8 et 40 €). Il peut augmenter par la suite, mais les risques sont limités au début et certaines arrivent à doubler la mise en trois semaines. Elles sont souvent courageuses et débrouillardes. Pour les aider aller plus loin, des sessions d’alphabétisation sont proposées et j’ai été impressionné par leur sérieux et leur joie, lorsqu’elles réussissent à écrire toutes seules leur nom ! Un animateur disait avec humour : c’est pour quand il y aura une banque dans la montagne.

Une autre source de résistance est l’attitude du mari pour celles qui ne sont pas veuves ou qui se sont remises en ménage. Les unes disent qu’il ne faut surtout pas qu’ils sachent car plusieurs d’entre elles se sont fait voler le prêt par leur mari qui a tout dépensé en boissons. D’autres disent que ce n’est pas bien de prendre un prêt sans en parler au conjoint. Une autre explique que son mari est d’accord et la soutient.  Il ne s’agit donc pas seulement d’entrouvrir un nouvel avenir pour chaque femme concernée, mais on touche ici à la vie du couple,  à la soumission et à la domination traditionnelles des femmes par des maris qui souvent les exploitent. C’est pourquoi il est parfois nécessaire que les facilitateurs les visitent à la maison et expliquent au mari l’objectif du prêt et le bénéfice que toute la famille en retirera à la longue.

C’est ainsi qu’à partir des drames que traversent ces régions toujours menacées par de nouveaux conflits, un espoir est un train de naître. Des femmes et des familles se reconstruisent, certaines se libèrent de dépendances pernicieuses et une population entre dans un processus de réhabilitation. Cela laisse espérer que demain se prépare déjà, qu’un renouveau est possible, car une poignée de personnes convaincues et bien formées, encouragées par d’autres qui les soutiennent efficacement d’au-delà des mers, croient que du mal, malgré tout, peut naître un bien…

Tout cela évoque Noël qui approche…. et les chorales qui sont en effervescence dans les villages nous le rappellent, même s’il n’y aura pas de réveillon... mais l’espérance sera célébrée.

 

vendredi 20 août 2021

L’Occident en panne d’utopie ( 20 aout 2021)

 

Vu des pays du sud, l’Occident donne l’impression d’être en panne de projet et de sens. Sa principale préoccupation actuelle semble être de maintenir à tout prix son niveau de vie et sa place traditionnelle économique et militaire dans le reste du monde.  

Voici comment il est perçu par beaucoup de peuples du Sud.

Maintenir le pouvoir d’achat, le niveau de la sécu, les réserves pour les retraites, sont certes des préoccupations légitimes. Chercher des marchés extérieurs pour exporter des produits finis ou des brevets, au risque d’augmenter d’autant le chômage national peut se comprendre.  Mais se protéger des migrants qui pourraient abuser de certains avantages, contrôler les lieux de la planète où il y a encore des réserves d’hydrocarbures dont la pénurie est régulièrement annoncée au détriment des nations peu développées pose déjà beaucoup plus de questions. Car derrière cette préoccupation de maintenir les « privilèges acquis », on semble continuer de considérer comme normal que 20% de la population mondiale jouissent de 80% des ressources de la planète. Avec un certain cynisme, on présente au reste du monde la « réussite du modèle de développement à l’occidental » comme ce que la modernité a produit de mieux tout en étant bien décidé à ce que le reste du monde n’accède pas au même niveau de consommation et de pollution.  Car cela signerait l’extinction de la planète. Imaginons les 7 milliards d’habitants jouissant du niveau de vie des classes moyennes et supérieures de l’Europe et des Amériques ! C’est inenvisageable… mais ce modèle est diffusé dans le monde entier via la télé satellitaire et l’internet. Si les ressources se restreignent il semble clair que ce sont toujours les mêmes qui en profiteront.  Quel parti politique en Occident peut mener sa campagne sur le thème : « cela a assez duré, maintenant on partage ! ». Pourtant tôt ou tard, de gré ou de force, on y sera obligé. Ce qui pose problème ici, c’est que l’avenir de l’Occident semble être derrière lui : on ne construit pas un avenir en se crispant à reproduire un passé déjà révolu.

En effet, alors qu’elle en pleine crise de son modèle financier et économique, en perte d’identité et de sens également, l’Europe est confrontée à une croissance économique quasi nulle pour les prochaines années alors que l’indice de croissance des pays émergents explose (Chine, Inde, Brésil, émirats…). .  Un certain nombre de pays sur les dictatures desquelles l’Occident appuyait sa croissance - sans état d’âme - s’engagent dans un avenir incertain.  Le printemps des uns risques d’être l’automne des autres.  Du coup, les occidentaux promettent aux pays arabes de les soutenir dans leur marche vers la démocratie à l’occidentale (la meilleure…) et dans la promotion des droits humains. Surtout pas l’islam au pouvoir. Certes, l’Occident ne veut pas perdre les marchés ni les ressources naturelles dont il a besoin pour maintenir son niveau de gaspillage.

Or, d’où j’écris, de l’Afrique profonde, on s’interroge : quel modèle l’Occident a-t-il à offrir à ces pays ?  La conception de la famille, des relations, de la transcendance qui domine dans les pays, les cultures et les religions des pays en développement ou émergents est pour eux une référence infiniment plus précieuse que le modèle occidental, même si celui-ci continue à fasciner par son niveau de confort et ses technologies. En effet, s’il n’a rien d’autre à proposer comme horizon de sens que la consommation la plus matérialise et la plus individualiste, l’absence de transcendance et le marasme du modèle familial, ainsi que la pauvreté des relations interpersonnelles, qu’a-t-il à offrir aux pays arabes et aux autres pays du Sud ? Les droits de l’homme ? Mais ceux dont il se revendique paraissent infiniment suspects vu du Sud ou de l’Orient. Des droits humains où les Etats-Unis refusent que la Palestine fasse partie de l’UNESCO (et lui retranche 75 millions de USD) mais soutiennent Israël qui méprise totalement depuis des décennies toutes les résolutions de l’ONU le concernant (et qu’ils arrosent de milliards chaque année) ? Où est la logique ? Vu d’Afrique, des pays arabes et de l’Orient, l’Occident est en train de perdre toute crédibilité. Quels droits humains quand il y totale liberté de circulation des marchandises, des flux financiers et des experts mais interdiction d’immigrer pour les travailleurs non qualifiés ou des étudiants du Sud qui n’ont aucun espoir dans leurs pays d’origine où presque personne n’investit sérieusement à part les pays émergents ? Cela ne signifie pas que je suis pour l’immigration sauvage, mais tôt ou tard, l’Occident sera obligé de les faire venir sauf à ne plus pouvoir entretenir ses infrastructures, sanitaires, routières ou ferroviaires, par exemple.  

Les Occidentaux sont-ils conscients qu’il existe une animosité croissante de la jeunesse des pays du Sud contre eux ? Ici, Kadhafi décédé est glorifié comme un héro de la résistance à l’impérialisme occidental et les journaux écrivent que les avions de l’OTAN ont tué plus de civils que le colonel… (Et je ne suis pas dans un pays musulman !). Ce fut le cas aussi lorsque Saddam Hussein ou Oussama Ben Laden ont été assassinés. Et tout le monde ici renvoie à l’échec des guerres occidentales en Iran et en Afghanistan, considérées comme uniquement destinées à contrôler les ressources naturelles …. 

Une lycéenne allemande de 17 ans a répondu récemment à une question sur le futur de l’Europe : « l’Europe n’a plus d’avenir, elle vit dans la frénésie mais en réalité rien ne se passe de nouveau…, on est dans la répétition frénétique. »

Le rêve moderne du progrès économique  illimité n’est plus crédible…

En effet, l’Occident ne semble plus croire en lui-même pas plus dans son modèle que dans son avenir.  Qu’a-t-il de dynamisant à offrir à la jeunesse du reste du monde ? Il doit renoncer au rêve d’un niveau de vie que ne peut plus assurer le néo-libéralisme. On sait que le souci lancinant de Mr Trichet, directeur sortant de la BME, était de maintenir le pouvoir d’achat de l’euro.  Aujourd’hui, quels sont les parents et les grands parents en Europe qui oseraient dire à leurs enfants ou leurs petits-enfants que leurs conditions de vie futures seront meilleures ou tout au moins égales aux leurs ? Le mythe du progrès purement matériel est condamné à mort.  C’est la fin du bonheur par le quantitatif et l’avoir. Quelle chance !  

L’Occident est en train de s’étioler par manque de sens, de réponse crédible aux questions auxquelles les mythes traditionnels répondaient à leur façon : d’où venons-nous ? qui sommes-nous ? où allons-nous ? Plus personne ne peut prédire l’avenir comme le montre la façon dont les Etats européens bricolent aujourd’hui la survie de l’Europe (malgré les mises en garde de J. Delors à l’origine). Ils en sont réduits à une politique purement réactive pour limiter les dégâts de crises structurelles à répétition: il n’y a plus de vision, seulement du replâtrage. On l’a vu lors du dernier G20 : l’horizon actuel des pays les plus riches du monde est d’essayer malgré tout  de maintenir un modèle qui n’est plus crédible en promettant des miettes aux pays pauvres. Je ne suis pas en contact direct avec les « indignés » mais je crois que c’est cela le cri de « ras l’bol » qui résonne aujourd’hui.

Un projet de société qui veut offrir un horizon de sens et un espoir de progrès dans l’humanisation des personnes et de  la planète peut-il se limiter au maintien égoïste d’un acquis, à une crispation sur ses avantages ? Peut-on se contenter d’un projet de vie où on se protège de tout (et surtout du partage) en lorgnant vers le nationalisme, le protectionnisme et le populisme ? L’Europe est tentée par le syndrome de la forteresse. Tant qu’on en restera au quantitatif, tant que l’horizon pour l’avenir sera la sécurisation des acquis du passés, il n’y a plus  ni avenir ni horizon. Il y a ici un réel risque de déshumanisation. Car l’être humain n’existe pas d’abord pour avoir, mais pour être et être avec et pour les autres. Bergson parlait de supplément d’âme…  C’est pourquoi, il est très important aujourd’hui d’être à l’écoute de certains groupes alternatifs qui sont moqués par les majorités comme  de pures utopistes.

Mais l’utopie est plus féconde que la peur ! Ils disent : puisque les grands  systèmes n’ont aucune alternative à proposer à la suite des échecs du communisme et du néo-libéralisme, créons du complètement neuf… avec les valeurs les plus anciennes : l’intériorité, la relation, la solidarité, le respect de toute personne dans son unicité, ainsi que de la planète… Non pas revenir en arrière, mais retourner au centre : l’homme est un être d’intériorité qui est fait pour la relation, la transcendance et la création. Il s’agit de sortir du quantitatif et du matérialisme pour revenir au qualitatif et aux valeurs spirituelles (prises dans un sens large, ou religieux).  Les chrétiens seront-ils au rendez-vous ?

Excusez ce cri qui vous vient du Sud, mais je crois qu’il reflète honnêtement le défi perçu aujourd’hui dans nos pays par beaucoup de personnes désillusionnées par des décennies de vaines promesses de partage.

En tout cas, en R.D. Congo, le choix est fait : quasi tous les projets officiels de développement sont confiés aux Chinois, pour une valeur de 60 milliards de USD. Mais, est-ce de leurs marchands et de leurs entreprises que nous pouvons attendre le supplément d’âme ? Faut-il passer du matérialisme occidental au matérialisme chinois ? Voici un défi pour les jeunes de nos pays...  et donc pour nous, leurs formateurs et parents.

Je sais qu’on ne peut parler de l’Europe comme d’un ensemble homogène, qu’il y a des grandes différences entre les pays, qu’il y a encore plein d’associations et de gens engagés et généreux qui croient dans l’homme et dans un  avenir plus humain, mais je me situe ici du point de vue de l’image que les médias et les expatriés  donnent généralement de l’Occident dans les pays du sud ou je travaille et voyage beaucoup.

jeudi 12 août 2021

les enfants connaissent la misère et sont victimes de plusieurs atrocités dans la ville de Bukavu. Quel avenir pour la jeunesse de demain ?

 

Au Sud-Kivu précisément dans la ville de Bukavu, plusieurs enfants passent la nuit à la belle étoile suite aux nombreuses manipulations qu’ils subissent ou à la pauvreté de leurs familles.

A cela s’ajoute, depuis les années 2000, une situation d’exploitation économique des enfants par leurs propres parents, les accusions de sorcellerie contre les enfants mais aussi le phénomène « enfant en situation de rue » a pris de l’ampleur dans cette ville.

Pourtant protégés par la constitution et plusieurs lois congolaises, ces derniers sont toujours oubliés et sont devenus responsables de leur vie.  Or la place de l’enfant c’est dans sa famille, à l’école et pas dans la rue.


Plusieurs chantiers des maisons dans cette même ville sont achevés grâce aux travaux que réalisent ses enfants en coulant les dalles.  Pourtant du point de vue légal, cela est interdit. L’on remarque des enfants qui travaillent dans des chantiers jour et nuit mais qui pour finir sont payés en monnaie de singe et d’autres qui se font escroqués leur prime par des personnes adultes qui les engagent frauduleusement.

En signalant ce que dit la convention internationale des droits de l’enfant à ses article 5, 9 etc. dit

« Art 5 : l’Etat respecte la responsabilité, le droit et le devoir qu’ont les parents ou, le cas échéant, les membres de la famille élargie ou de la communauté… de donner à celui-ci, d’une manière qui corresponde au développement de ses capacités, l’orientation et les conseils appropriés à l’exercice des droits que lui reconnait la présente convention.

Art.9 : l’Etat veille à ce que l’enfant ne soit pas séparé de ses parents contre leur gré, à moins… que cette séparation soit nécessaire dans l’intérêt supérieur de l’enfant. »

La loi n°09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l’enfant en RD. Congo à ses articles 46, 58 etc. poursuit en disant :

« Art. 46 : l’enfant a son domicile, selon le cas, chez son père et mère et d’être élevé dans la mesure du possible par eux.

Art. 58 : l’enfant est protégé contre toutes les formes d’exploitation économique.

L’exploitation économique s’entend de toute forme d’utilisation abusive de l’enfant à des fins économiques. L’abus concerne notamment le poids du travail par rapport à l’âge de l’enfant, le temps et la durée de travail, l’insuffisance ou absence de la rémunération, l’entrave du travail par rapport à l’accès à l’éducation, développement physique, moral, spirituel et social de l’enfant. »

Malheureusement cela est loin de la réalité.

Ceci laisse à croire que plusieurs personnes le font en cachette et d’autres par ignorance de la loi pourtant dit-on « nul n’est censé ignorer la loi »

Pour préparer l’avenir de ses enfants, nous osons croire que l’Etat congolais, les organisations des droits de l’homme et ceux qui œuvrent dans le domaine de la protection et l’éducation de l’enfant mais aussi la communauté devraient avoir un regard positif vis-à-vis de ses enfants dont jusqu’aujourd’hui la vie future est en danger.

 Ces enfants, dans plusieurs avenues de la ville de Bukavu voire même dans les marchés comme par exemple de Kadutu, Nyawera, Beach Muhanzi, tous à Bukavu, sont à la base des insécurités, des vols et viols des enfants mineurs.



Une fois l’enfant grandi dans cet état, il n’est pas évident qu’il change, la plupart deviennent des voleurs à main armée et d’autres sont à la base des enlèvements des enfants, un phénomène qui est aussi en train de prendre de l’ampleur dans la ville de Bukavu, Kinshasa, Goma, Lubumbashi etc. et qui risque d’échapper au contrôle des services d’ordre dans les jours à venir.

A Kinshasa par exemple, ces enfants sont déjà surnommés « KULUNA », par contre à Bukavu, on les appelle de « MAI BOBO » des surnoms que nous pensons n’avoir aucun sens et aucune signification du point de vue éthique.

Toujours à Bukavu, ces enfants passent des journées dans les canaux d’eaux à la recherche des métaux de cuivre qu’ils vendent pour se trouver de quoi manger.

En 2007, certaines organisations de l’Archidiocèse de Bukavu ont commencé à prendre conscience de l’avenir de ces enfants et sont directement passés à l’action comme c’est le cas du Foyer Ek’Abana qui depuis cette année, a identifié certains enfants qui subissaient l’exploitation économique par leurs parents en vendant de l’eau contre le manioc dans le marché du beach Muhanzi pour nourrir leurs familles. Ses enfants ont été surnommés par la communauté « enfant MAI MUHOGO ».


A cela il y a des organisations qui s’occupent de ces enfants victimes dont nous pouvons citer à titre d’exemple :

-          Le PEDER qui s’occupe des enfants de la rue

-          Le centre Nyota qui accompagne par la formation professionnelle des filles victimes des violences sexuelles

-          Le Foyer Ek’Abana qui s’occupe des enfants accusés de la sorcellerie

-          Le Centre Don Bosco qui s’occupe des enfants en situation de rue, etc.

Toute ces organisations font leurs parts dans la protection et l’encadrement des enfants.

Le travail que réalise ces dernières devrait interpeller le gouvernement et d’autres organisations à s’impliquer davantage pour répondre aux multiples problèmes de ces enfants qui sont l’avenir de demain malheureusement oubliés.

Dans nos investigations, nous avons interview Monsieur Steven MBALAMBALA qui est animateur social au Foyer Ek’Abana et qui, il n’y a pas longtemps, a été dans l’équipe qui a identifié et documenté les cas des enfants vivants dans les rues à Bukavu :

Steven Mbalambala animateur de son état nous précise que

Je suis animateur social au Foyer Ek’Abana chargé de la médiation familiale

Il n’y a pas longtemps nous avons fait le dénombrement des enfants en situation de rue et l’identification parce que nous avons trouvé que le nombre des enfants qui vivent dans la rue à Bukavu est en train d’augmenter.  A l’issue de ce travail, nous somme parvenus à localiser la provenance de ses enfants afin de proposer la stratégie à mettre en place pour diminuer la délinquance des enfants.

En voulant savoir les causes qui font à ce que les enfants se retrouvent dans la rue, Mr Steven poursuit son speech en disant :


Par rapport à ce qui fait que les enfants soient dans la rue, il y a la séparation des parents, quand ils divorcent ou quand ils meurent, les enfants se trouvent en train de chercher leur éducation seule sans limite, mais aussi il y a la pauvreté de la famille et quelque fois l’enfant lui-même.

Au moins 80 pour cent de ces enfants viennent du territoire de Kabare surtout Kabare Nord dont (Mudaka, Murhesa, Kavumu, Katana voir même Kalehe).

Ces enfants dans la rue vendent des beignets pour les adultes, d’autres vendent des sachets etc. parmi eux nous avons aussi trouvé que leur travail est de voler seulement et d’autres fument du chanvre.

Parlant de l’avenir de ces enfants, Steven continue en disant :

De l’avenir de ses enfants, nous pensons que ses enfants n’ont pas d’avenir parce que la communauté ne se sent pas vraiment responsable. Nous pensons qu’il faut peut-être soutenir et augmenté les centres d’hébergement. D’ailleurs nous avons déposé le résultat de notre enquête au gouvernement provincial.

Nous invitons toutes les couches sociales à conjuguer les efforts ensemble afin de voir comment sauver ses enfants.

A conclu Mr Steven.

Destin Byandike Kad.

Destin Byandike Kad. Journaliste indépendant en RD. Congo et membre de l’Union Nationale de la Presse du Congo et chargé de communication de Germes d’Espérance au Sud-Kivu.

 





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