Joseph E. Mwantula, Tu le diras à ma mère, L’histoire vrai de
Coco Ramazani, Paris, Présence Africaine, 2015, 299 pp.
Un lecteur peu informé sur la situation des femmes dans la
région des Grands-Lacs africains et particulièrement en République Démocratique
du Congo pourrait avoir du mal à croire que l’orpheline Coco ait pu subir
autant de violences sexuelles, d’humiliations et de souffrance en tout genre.
Pourtant, la réalité est bien là. Il s’agit d’un pays sans Etat, corrompu
jusqu’à la moelle, où toute fonction de pouvoir donne droit à la prédation sur
les femmes de l’entourage. Y dominent la misère, la lutte pour la survie
quotidienne : c’est cela la douloureuse réalité. Les enfants, les jeunes
filles et les femmes sont soient happées au passage ou bien n’ont d’autres
possibilités de survie que de « s’offrir » à des relations sexuelles
souvent violentes et dégradantes, au marché, à l’université, parfois dans les
églises. Ce livre se présente comme le journal d’une jeune femme orpheline qui
a été ballotée d’un membre de famille à l’autre, d’un lieu à l’autre, abusée
enfant par un pasteur, enlevée, séquestrée par la suite, entraînée dans un
groupe politique à travers le pays lors des guerres de pillage importées par
les Rwandais et les Ougandais dans l’Est du Congo. Elle finit par échouer aux
Etats-Unis chez une sœur qui l’exploite également et y découvre qu’elle est séropositive.
Le récit est puissant, les descriptions des lieux et de
événements d’un grand réalisme, les scènes de violence quasi insoutenables
parfois… Mais c’est la vécu de nombreuses femmes congolaises qui font preuve
d’un courage inimaginable, particulièrement pour protéger et entretenir leur
famille. Ce livre sans concession permet de réaliser ce qui reste de ce pays
magnifique après des générations de gouvernement prédateurs. Heureusement que
la mobilisation des solidarités, familiales, humanitaire, ecclésiales,
apportent un peu de baume sur un océan de déréliction…