Jean Moriaud, Vraiment, il est là, Une relecture de ma vie avec Dieu, 2017, 183
pages.
Voici un petit
livre passionnant ! Pour Jean, la définition de la mission, « c’est toujours « vivre
avec », et m’intéresser aux personnes pour qu’elles s’intéressent un peu
plus aux autres et, si possible, à Dieu ». Notre confrère a passé 22
ans au Burkina et 10 ans au Tchad et est un conteur-né. Il a un grand sens de
l’observation et de l’humour, un cœur large, et il aime mettre en valeur les
merveilles que fait le Seigneur chez les autres. La « relecture de sa
vie » est comme une ode à l’Esprit-Saint. Il en parle avec humilité et
réalisme. On y perçoir beaucoup d’humanité, d’intérêt pour les personnes et
leur culture, de souci de trouver avec elles des solutions à leurs problèmes et
de les mettre en relation entre elles pour progresser ensemble dans leur vie
quotidienne et chrétienne.
Cette attitude
lui vaut progressivement la confiance des autorités traditionnelles autant
qu’administratives, ce qui lui sera bien utile quand il se lancera dans des
projets de développement avec les gens, en commençant par les jeunes. Il ne
fait pas de théorie sur le dialogue avec
les religions traditionnelles africaines, mais son quotidien de pasteur le
met en situation permanente de rencontre. C’est ainsi que la confiance créée
avec les anciens l’aidera à faire accepter les jeunes et leurs projets par les
chefs locaux. Que ce soit à propos de la création de groupes de danses traditionnelles,
d’initiation à des artisanats locaux, de la création d’un centre de formation
pour aveugles ou d’un village pilote pour jeunes agriculteurs. Il s’engage
aussi dans l’inculturation de la
liturgie pascale…
Il ne propose
pas non plus de théorie sur JPIC, mais
quand il rencontre un problème qui touche à la santé ou à l’équilibre alimentaire
de la population, il mobilise tout le monde. Ainsi il apprend à des personnes aveugles
à planter des oignons et les populations à construire des puits ou aménager des
sources.
Son travail
pastoral rejoint aussi la souffrance des gens, comme pour la mort du jeune
Kizito à la suite de l’initiation et les questions liées à l’exode des jeunes vers
Abidjan. Voilà un patient travail de formation et d’accompagnement de catéchistes,
de responsables de communautés ou de mouvements de jeunesse…
C’est dans
l’action de grâce et l’enthousiasme qu’il évoque ces années de fécondité apostolique
accompagnée d’une vie de prière profonde. Certes, sa joie de partager les beaux
fruits ne lui laisse pas beaucoup de place pour nous parler des échecs, des difficultés
communautaires ou des découragements qu’il laisse pudiquement de côté. Mais
voilà, il s’agit plus d’un Magnificat que d’un De profundis… Je le suggère
particulièrement à nos frères qui « ne veulent pas être nommés en
brousse »…
B. Ugeux