vendredi 20 mai 2022

LA PROVINCE DU SUD-KIVU FACE A LA RECRUDESCENCE DES PHÉNOMÈNES CLIMATIQUES : CAS DE LA VILLE DE BUKAVU (EXTRAIT DU JOURNAL KARIBU N°46-47 /2022)

 

La Province du Sud-Kivu, à l'instar d'autres Provinces de la République Démocratique du Congo se voit confrontée depuis de longues années à des phénomènes parfois extrêmes, difficiles à bien discerner par la grande majorité de la population.

En effet, d'une manière globale, le climat au sein de notre province était stable d'un côté. D'autre part, l'alternance entre les saisons était bien respectée, en ce sens qu'à partir du mois de septembre, la saison pluvieuse se manifestait et ce jusqu’au mois de mai, elle s'arrêtait pour céder la place à la saison sèche qui à son tour, débutait au mois de Juin, se poursuivait en juillet, pour s'arrêter vers la fin du mois d'août. Cependant, il y a quelques années, l'opinion observait que la saison pluvieuse se prolongeait, ou encore, la saison sèche, continuait au-delà du mois d'août. Pendant ce temps, la pluie tombait sur l'étendue de la province sans se faire accompagner des tempêtes, des orages, des inondations, des grêles intempestives, etc... La saison sèche quant à elle, présentait des journées ensoleillées, mais le soir, la chaleur diminuait au fur à mesure, sans impacter négativement sur l'agriculture, la santé, la biodiversité, etc..

Pourquoi devons-nous parler d'un dérèglement climatique au Sud-Kivu ? Ici, notre réaction est tout à fait claire. Les perturbations climatiques ont eu des impacts très négatifs sur la vie des populations de notre province. Le secteur agricole est sérieusement menacés car, l'abondance des pluies diluviennes endommage les culture en les faisant pourrir. La sécheresse prolongée à son tour assèche les cultures, les sources d'eau et notamment la nappe aquifère, détruit la biodiversité, créé des canicules diurnes et nocturnes, etc...

Faisant face à toutes ces situations, quelles peuvent en être les causes ?

La première chose que nous devons retenir, c'est le fait qu'un acte de destruction ou de dégradation d'un élément  l'effet du système qui vivait en interaction, a des conséquences qui vont au delà du milieu auquel la destruction venait de se produire.

   


                                                                             

En effet, les experts ainsi que les acteurs du domaine de l'environnement ont observé passivement la destruction des écosystèmes forestiers ici en province, sans penser aux impacts.

Par ailleurs, il est impérieux de rappeler que la déforestation entraîne des conséquences très désastreuses, parmi lesquelles nous soulignons l'augmentation des émissions de gaz à effet de serre, laquelle serait sensiblement réduite par l'existence de l'écosystème forestier stable de la province.

Comme conséquence, la population sud-Kivutienne assiste passivement à des phénomènes climatiques atroces, auxquels elle présente la vulnérabilité. Parmi ces impacts, le Sud-Kivu connait la recrudescence des inondations, des éboulements, des érosions et affaissements des sols. Notez aussi que la présence des insectes ravageurs de l'agriculture sévit dans certains territoires, les maladies et les épidémies menacent les populations, etc. Que faudra-t-il faire ?

La population du Sud-Kivu est appelée à mettre en place les mécanismes d'adaptation, d'atténuation, mais notamment ceux de résilience en vue de faire face à ces phénomènes dévastateurs.

Parmi ces mécanismes, nous suggérons, le reboisement et ou la reforestation des espaces ou des sites détruits et dégradés

-La promotion des énergies renouvelables, propres et durables, telles que : les briquettes issues de biomasses, les énergies solaires, le gaz, le biogaz, etc.....

- La promotion des foyers améliorés

-L'utilisation des méthodes culturales adaptées

-L’abandon total de l'utilisation des énergies fossiles

-L'adoption des eco-gestes comme mode de vie

Nous estimons qu'avec ce schéma, la province du Sud-Kivu et sa population pourrait encore créer sa résilience face aux phénomènes climatiques extrêmes.

 

NB. Vous pouvez recevoir la totalité du journal KARIBU en écrivant sur : ouedraogomichelsenior@gmail.com 

jeudi 5 mai 2022

LE GAZ METHANE DANS LE LAC KIVU, UN DANGER POUR LA POPULATION

Le gaz méthane est une ressource se trouvant dans le lac Kivu à l’Est de la République Démocratique du Congo et à l’Ouest du Rwanda pays voisin du Congo. Il représente aujourd’hui un danger permanent pour la population vivant au Sud et au Nord-Kivu en RDC, au Rwanda, une partie de l’Ouganda et la moitié du Burundi. Il est aussi une grande ressource énergétique très importante dans la mesure où on l’exploite d’une manière bénéfique pour ces 4 pays en général et la population riveraine en particulier.

Le grand danger que présente ce gaz est le fait qu’à quelque kilomètre du lac, se trouve le volcan Nyirangongo. Certains chercheurs estiment que si jamais le volcan crée un canal souterrain dans le lac, cela provoquerait l’explosion gazeuse dans cette partie de la région.

Le Rwanda pays voisin de la RDC, a commencé depuis 2016 à exploiter cette ressource avec le partenariat de Kivuwatt qui est piloté par la société américaine « ContourGlobal ».  Cela représente un pas à encourager parce que non seulement cela contribue à la création d’emplois pour des jeunes, au renforcement de l’économie de ce pays, mais aussi à la diminution des risques que présente cette ressource.

Plus de deux millions de personnes seraient en danger en cas d’explosion du gaz. La ville de Bukavu avec certains villages des territoires d’Idjwi, Kalehe et Kabare, la ville de Goma, le Rwanda, seraient les premiers victimes de cet enjeu dangereux du fait que la population vit aux alentours du Lac.

Pour la RDC, en janvier 2020, l'ancien ministre national des Hydrocarbures, Rubens Mikindo, avait lancé un projet d'évacuation du gaz carbonique et du méthane contenu dans le lac, le méthane pouvant alors être utilisé pour produire de l'électricité, mais jusqu’à présent, rien n’a été fait.

Une société tunisienne a même été recrutée pour l'exécution du projet mais le problème des autorisations s'est posé lors de la signature du contrat car il fallait avoir en même temps l'autorisation d'exploitation du gaz méthane (qui relève du ministère national des hydrocarbures) et l'autorisation de production d'électricité (qui relève du ministère de l'énergie et des ressources hydrauliques)"

On connaît les émanations de ces gaz qui ont déjà causé la mort de bétail dans certains quartiers à l'ouest de Goma. Deux ans plus tard et alors que ce projet n'a pas avancé, le ministère provincial en charge des ressources hydrauliques, de l'énergie et des hydrocarbures au Nord-Kivu évoque des soucis administratifs mais il affirme que l'exploitation pourrait démarrer sous peu.

En en croire plusieurs activistes de droits de l’homme, l’exploitation du gaz dans le lac Kivu devrait se faire par une collaboration bilatérale entre le Congo et le Rwanda, afin d’apporter des solutions durables et une assurance à la population qui reste avec la peur au ventre ne sachant ni le jour ni l’heure où le pire peut arriver.

Pourtant, les habitants de Goma et Bukavu continuent à critiquer le manque d'information concernant le dégazage du lac Kivu. Le fond du lac contient en effet d'importantes quantités de gaz toxiques qui, en cas de tremblement de terre ou d'éruption volcanique, risquent de s'échapper. Un danger justement redouté lors de l'éruption du Nyiragongo en mai 2021.

La société civile Congolaise dénonce le blocage de ce projet qui, selon elle, est la conséquence de la mauvaise gestion, voire de la corruption, de la part des autorités de régulation du secteur des hydrocarbures au Congo.

Alors que l'exploitation et la transformation du gaz méthane n'a pas encore commencé, une petite unité est en service au niveau du golfe de Kabuno pour réduire la menace du dioxyde de carbone autour du lac Kivu. Mais cela ne suffit pas vu l’ampleur des menaces que présente cet enjeu.

Bref, une telle concentration de gaz au Lac Kivu est problématique, car elle pourrait servir de détonateur pour une éruption limnique, caractérisée par le dégazage brutal du lac qui relarguerait alors les couches de gaz amassé durant des années. En pareilles circonstances, les conséquences humaines peuvent en être dramatiques.

Rappelons qu’en 1986, le gaz libéré par le lac Nyos, au Cameroun, avait ainsi tué par asphyxie plus de 1 700 personnes, dans un périmètre de 25 kilomètres. Deux ans auparavant, toujours au Cameroun, un phénomène semblable, survenu aux abords du lac Monoun, s’était soldé par 37 décès. Or, le Kivu contient mille fois plus de gaz que le Nyos, tout en se situant dans une région très fortement densifiée, où vivent plus de deux millions de personnes. Et comme la concentration du gaz augmente au fil des ans, la possibilité d’une éruption limnique s’accroît, mécaniquement. Cité par l’hebdomadaire Jeune Afrique.

Présentation de Destin BYANDIKE


lundi 2 mai 2022

Nouvelle lettre de la Savane N°49 d'avril 2022

 

Chers amies, chers amis,

En ce temps pascal, je souhaite à tous ceux et celles pour qui cela a un sens une belle fête de la résurrection. Croire que la mort n’a pas le dernier mot dans notre vie est source d’une grande espérance alors qu’autour de nous il est si souvent question de violence et de massacres. Que cette espérance nous aide à regarder l’avenir avec confiance malgré tous les soubresauts de notre monde aujourd’hui.

Comme vous certainement, je suis très touché par l’horreur de ce qui se passe en Ukraine et qui mobilise les médias. Nous pensions que ce genre de guerre n’existerait plus en Europe, et voilà qu’un seul homme déséquilibre presque tous les repères de notre planète, alors que l’épidémie de Covid nous avait déjà renvoyé à nos fragilités.  Avec le risque d’oublier les autres lieux du monde, comme notre pays, où les déplacés se comptent par millions et où il n’est pas possible de dénombrer les morts et les victimes de violence.

Que ce soit ici ou là, ce qui pour moi reste une raison d’espérer, c’est l’extraordinaire mobilisation de compassion et de solidarité que provoque chaque drame dans notre monde.

                                      

Partout et toujours, il y a des personnes qui donnent le meilleur d’elle-même quand elles en voient d’autres souffrir autour d’elles. Je me dis souvent : « tu as reçu gratuitement donne gratuitement ». Et vous en faites partie, vous qui continuez à nous soutenir, alors que vous êtes tellement sollicités, conscient(e)s que sans votre soutien, ces centaines de victimes que nous accueillons chaque année n’auraient pas d’avenir. Vous savez à quel point nous vous en sommes reconnaissants. Vous trouverez ci-dessous le lien vers une vidéo que nous avons produite -avec les moyens du bord – pour partager le témoignage de personnes accueillies et d’animateurs du centre Nyota.

Cette année encore, j’ai eu l’occasion de célébrer la Semaine sainte avec des jeunes universitaires dans le cadre d’une retraite de trois jours. J’ai été frappé une fois de plus par le sérieux de leur engagement. Dès l’arrivée, chacun remet son smartphone aux animateurs qui leur restituent à la fin de la vigile pascale. C’est alors l’immersion dans un grand silence où alternent chaque jour deux conférences et la célébration du jour, avec des temps de prière personnelle et quelques carrefours. Les célébrations bien préparées par la chorale et l’équipe liturgique sont des temps forts où je m’inspire d’apports nouveaux pour eux comme la vénération de la croix dans la tradition de Taizé ou l’annonce de la résurrection par trois jeunes femmes, comme dans les évangiles, inspirée par la Conférence des Catholiques de France.



Sur les quarante-six participants, garçons et filles, j’en ai reçu trente qui souhaitaient avoir un contact personnel avec moi. Ce fut l’occasion pour moi de les rejoindre dans un quotidien très difficile. Beaucoup ont de sérieux problèmes familiaux. Certains n’arrivent qu’à grand-peine à assurer les frais académiques, sans parler du coût des vêtements, de la nourriture, des déplacements et les fournitures diverses.

Je suis impressionné par leur courage et leur détermination, alors qu’ils ne se font pas d’illusions quant à la possibilité de trouver du travail quand ils seront diplômés, étant donné qu’il n’existe pratiquement pas de création d’emplois dans cet immense pays au potentiel illimité, dont les richesses sont accaparées par quelques-uns ou exportées.

Au centre Nyota de Bukavu ainsi qu’à l’école de menuiserie de Kamituga, les activités de formation et de réinsertion se poursuivent normalement malgré une forte augmentation du coût de la vie, particulièrement en ce qui concerne les transports. Soulignons quatre activités récentes : l’apport de repas protéinés à une cinquantaine de filles accueillies qui souffrent de grave malnutrition, le développement de la formation à l’éducation à la paix proposée aux jeunes volontaires afin que, de retour dans leur milieu, elles qui ont tellement souffert de la violence, deviennent des médiatrices de paix. La poursuite des démarches administratives pour obtenir une attestation de naissance pour une cinquantaine de filles cette année, qui n’ont aucune pièce d’identité.

Et enfin, la création d’une unité de production artisanale de savon nous permet de former des jeunes à cet artisanat en complément aux autres formations professionnelles qu’elles reçoivent durant les trois à cinq ans qu’elles passent dans notre maison. Je rappelle que chaque année elles sont au nombre de 250 minimum, en externat. Inutile de préciser que sans votre soutien aucune de ces activités ne serait possible en plus des frais de salaires et de fonctionnement.


Peut-être avez-vous entendu parler des coups d’état successifs dans plusieurs pays du Sahel (Guinée, Mali, Burkina Faso). Ceux-ci ont entraîné l’expulsion du Mali des troupes françaises de l’opération Barkhane. Les populations de ces pays ont développé un rejet des troupes européennes à qui elle reproche d’être inefficaces depuis de nombreuses années et de rechercher leurs propres intérêts économiques. Cela est évidemment très mal perçu par les pays européens, qui oublient souvent qu’ils sont d’anciens Etats colonisateurs. Le pillage des matières premières par les multinationales occidentales qui se poursuit sans vergogne avec souvent le soutien de leurs Etats entraîne un rejet de l’Occident et parfois du Blanc, qu’on ne comprend pas vu de loin. Les Occidentaux disent : « nous venons les aider et ils nous rejettent ». On ne peut nier que leur présence peut s’expliquer par des demandes de certains gouvernements africains et qu’elle a pu, à certains moments, éviter un renversement violent de régime. Mais le fait que cette présence s’est installée alors que les gouvernements changent sur place entraîne des soupçons. Au point de préférer faire appel aujourd’hui à des troupes (ou des mercenaires) russes, au Mali ou au Cameroun par exemple, dont la réputation de brutalité n’est pas à prouver. Les Occidentaux le vivent d’autant moins bien qu’on découvre comment ces troupes se conduisent actuellement en Ukraine. Mais ce rejet devrait nous encourager à un certain examen de conscience concernant une forme de paternalisme militaire – du moins c’est comme cela que c’est perçu – qui provoque des méfiances dont nous-mêmes qui vivons sur le terrain depuis très longtemps faisons parfois les frais. Sur le plan économique, l’exportation quasi systématique de matières premières à l’état brut (minerais ou forêt) sans aucune transformation locale est perçue comme une forme de prolongation du colonialisme. Créer des entreprises de transformation de ces produits permettrait la création de milliers d’emplois locaux. Il y a suffisamment de diplômés compétents en Afrique et de jeunes prêts à être formés.


Certains gouvernements africains comme des multinationales occidentales et asiatiques sont complices de ce pillage dont ils sont les principaux bénéficiaires. On l’a déjà dit : si l’on payait à leur juste valeur les « terres rares » dont sont composés nos smartphones, nous devrions payer 20% de plus que les prix écrasés actuels. Vous avez peut-être eu l’occasion de voir le documentaire belge « Du sang dans nos portables » qui décrit dans quelles conditions ces minerais sont extraits par des enfants exploités en RDC.

Quant à moi, je m’adapte bien dans la communauté de formation dont je fais partie depuis le 2 février. J’apprécie beaucoup l’esprit de la maison et le dynamisme des vingt-quatre jeunes en formation. Ils passent trois ans ici, pour s’initier à la vie spirituelle, communautaire, apostolique et missionnaire, et recevoir une formation universitaire en philosophie et en sciences humaines. Ils ont aussi divers engagements apostoliques dans des lieux de « périphérie » auprès des plus démunis.


Je devrais enseigner ici l’an prochain. Je suis encore engagé dans quelques formations permanentes et poursuis mon engagement dans mes projets humanitaires et caritatifs que vous supportez vaillamment.

Enfin, notre pays se prépare à accuellir le Pape François au mois de juillet. C’est une source de joie et d’espérance dans ce pays si largement catholique (40 %) et si meurtri par les affrontements armés et les éruptions volcaniques.

 

 

 

 

 

 

 

 

Ce sera un grand temps de célébration fraternelle où l’Eglise locale attend une confirmation de ses engagements au service du peuple congolais.

Nous espérons que tout se passera dans le calme, étant donné qu’il viendra aussi près de chez nous (à Goma, de l’autre côté du lac Kivu) dans une province en état de siège.

Je vous quitte en vous envoyant les amitiés reconnaissantes de mes divers collaborateurs ainsi que de tous ceux et celles qui retrouvent le sourire grâce à votre solidarité priante et financière.

Bernard Ugeux M.Afr.

Lien pour visionner notre nouvelle vidéo avec des témoignages des jeunes filles du Centre Nyota. https://youtu.be/m-2Ztz7Q06g



 




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