lundi 27 septembre 2021

Nouvelle Lettre de la Savane N°47 de septembre 2021




Chères amies, Chers amis, 

Je vous rejoins alors que l’automne s’invite dans l’hémisphère nord et que je me prépare à rejoindre l’hémisphère sud. En effet, ce 2 octobre je m’envole pour la RDC afin d’y reprendre mes activités pastorales et caritatives. Muni de trois vaccins contre la Covid et d’un test PCR négatif, j’espère que tout se passera bien dans l’avenir.

Je voudrais vous remercier de tout cœur pour la façon dont vous m’avez accueilli en ce temps de congé, pour des moments de détente, de travail (conférences, réunions pour recherche de fonds, émission radio, etc.), de retrouvailles familiales et amicales. Ce fut un temps très riche qui a été marqué par le triple jubilé que je célèbre cette année et que beaucoup d’entre vous m’ont souhaité avec beaucoup d’amitié par leurs messages ou lors de leur participation à la fête qui s’est déroulée le 11 septembre à Parisot dans le Tarn. 

Après la célébration eucharistique dans une chapelle ancienne récemment restaurée, nous nous sommes retrouvés pour des agapes fraternelles dans la propriété de mes amis Nouvellon.

En fin de repas, les participantes et participants, que j’ai rencontrés dans des contextes très divers, ont évoqué à quelle occasion nous nous sommes découverts et ce qui a maintenu l’amitié entre nous. Cette sorte de « relecture du cœur » m’a apporté beaucoup de joie et m’a permis de faire mémoire de la fécondité de ces 17 ans que j’ai passés à Toulouse et des rencontres qui se sont poursuivies à l’occasion de mes congés. Une fois de plus, je rends grâce au Seigneur de s’être servi de moi pour faire connaître son amour.


Votre amitié fidèle est, avec ma relation au Christ et ma vie de communauté, un soutien irremplaçable sans lequel je ne pourrais pas mener ma mission dans un pays marqué par beaucoup de violence et de désordre, mais aussi de courage, de solidarité et de créativité de la part de populations laissées à elles-mêmes. Merci encore de tout cœur pour votre soutien affectif et financier qui m’est si précieux, ainsi qu’aux personnes vulnérables dont je m’occupe. Voici le lien du Jubilé au Centre Nyota :  https://1drv.ms/v/s!AuMalqelnvJ1hf5M9rBpm3jyCGukqw?e=Moe5DH

Nous sommes quelques-uns à travailler sur la façon d’assurer la pérennité des projets de Germes d’Espérance, avec des soutiens de France, de Suisse et de Belgique.

Cette année ici encore, les résultats des centres Nyota (Bukavu) et Kamituga (diocèse d’Uvira) ont été excellents. Pour le centre Nyota, 100 % des 24 candidates au jury d’enseignement primaire ont réussi, ainsi que les 31 candidates au jury national de coupe et couture. Les éducateurs et enseignants ont fait preuve d’excellence et sont d’un très grand dévouement.




Je voudrais dire un mot à propos du trafic humain. Vous savez sans doute que c’est un des trafics mondiaux les plus lucratifs, après ceux des armes et de la drogue. La RD Congo est évidemment aussi impactée par ce trafic. Ce trafic ne concerne pas seulement des personnes exploitées d’un continent à l’autre. Certes, j’ai eu moi-même l’occasion de rencontrer des jeunes Congolais qui voulaient partir vers des camps de réfugiés de pays limitrophes, à partir desquels on leur avait promis le voyage vers l’Amérique du Nord pour étudier gratuitement, et un jour s’y installer. Des jeunes filles sont venues me voir, appâtées par des rabatteurs travaillant en réseau, qui leur avaient promis de leur payer des études à l’étranger. Désireuses d’étudier et aussi d’aider leur famille, ces jeunes m’ont demandé de leur fournir l’argent du passeport (plusieurs centaines de dollars). Quand je leur ai demandé par quel réseau elles partaient et qui étaient les intermédiaires, il a été impossible de tracer les personnes qu’elles avaient rencontrées. J’ai donc refusé de leur payer le passeport malgré leur insistance et même leur colère.

Mais ceci n’est qu’une petite partie du trafic qui se développe sous nos yeux, il y a surtout autour de nous les maisons de tolérance qui emploient des mineurs, les mines d’or ou de cobalt qui utilisent des enfants comme des esclaves, les groupes armés qui enlèvent des enfants pour qu’ils deviennent soldats ou « épouses » de leurs guerriers, etc. Tout cela représente des facettes du trafic humain. Je considère donc que le travail réalisé par notre réseau Germes d’espérance, en arrachant des filles à l’esclavage, à la prostitution, en extirpant des mines d’or des enfants exploités afin de leur apprendre un métier, représente une résistance concrète au trafic humain. Ayant acquis une compétence et une autonomie, ces jeunes sont moins tentés par les réseaux de trafic.

Dans ce cadre, je collabore avec un Réseau international (Talitha Kum) qui a été initié en 2009 par l’Union Internationale des Supérieures Générales et des Supérieurs Généraux des congrégations religieuses de l’Eglise catholique (UISG-USG). Il existe un immense maillage de congrégations religieuses qui recouvrent les cinq continents. 

L’objectif de ce réseau est de : « promouvoir  le travail en réseau entre personnes consacrées et autres organisations sociales, religieuses et politiques au niveau national et international ; renforcer les actions et les initiatives existantes, en optimisant les ressources de la vie consacrée pour promouvoir  des actions de prévention, sensibilisation, protection, assistance et dénonciation de la traite; développer des programmes éducatifs de conscientisation sur ce phénomène; réaliser  des actions prophétiques, en dénonçant les causes de l'exploitation de la vie pour des finalités économiques et la traite des personnes et en promouvant des campagnes pour le changement de mentalité et des habitudes »[1].   Face à un péril mondial il faut une réponse mondiale, ce dont est capable l’Eglise catholique à l’œuvre dans le monde entier. C’est pourquoi je suis engagé dans le réseau de la RDC.

Il me paraît important de vous présenter ce projet qui exprime la volonté de l’Eglise de protéger les plus faibles par des engagements concrets et risqués. Et cela au moment même où, en France, la commission Sauvé va rendre compte des résultats de son travail (le 5 octobre). Créée à l’initiative des évêques de France et du réseau des religieuses et religieux de France (COREF), cette Commission indépendante d’enquête sur les abus sexuels dans l’Église a travaillé durant trois ans . Ce sera un rappel douloureux de ce scandale qui ébranle l’Eglise depuis de nombreuses années.

Pour nous en RDC, C’est une raison de plus pour soutenir les 13 jeunes Missionnaires d’Afrique qui viennent d’être ordonnés prêtres dans notre Province d’Afrique Centrale. Qu’ils osent affronter les défis d’aujourd’hui alors qu’ils rejoignent leur lieu de mission, dans un autre pays que le leur. Je confie aussi à votre pensée et votre prière notre Chapitre Général qui se réunira au mois de mai pour faire le bilan des 6 années passées, et envisager l’avenir des 6 prochaines, dans notre monde bousculé.

Avec toute mon amitié, Bernard

Messe de jubilé à Parisot (Tarn) le 11 septembre avec la chasuble-même de mon ordination (45 ans). Entouré de Michèle et Philippe Nouvellon qui nous ont si bien accueillis dans leur propriété.

Un grand merci à ceux et celles qui nous aident,  au nom de ceux et celles qui en bénéficient ! Notre objectif est de les rendre autonomes demain. 



lundi 20 septembre 2021

Un Centre au service de la jeune fille (le centre Nyota à Bukavu) (20 sept. 2021)

 

Du 26 au 27 août 2021, les filles en coupe et couture au centre Nyota se trouvant à Bukavu au Sud-Kivu ont participé à l’examen national de couture sous le haut patronage de la Division des affaires sociales du Sud-Kivu.

A cette occasion, 31 filles du centre Nyota ont participé et à l’issue de la proclamation, il y eu 31 réussites dont la première Ntalimbirwa Zihindula avait eu 85% et la dernière 54%.

La directrice qui nous a livré une interview, madame Noëlla, tient à remercier la Division des affaires sociales qui a trouvé utile d’accompagner les filles de la formation professionnelle pour l’obtention des brevets et la participation au test national.

Pour rappel, le centre Nyota c’est un centre de récupération et d’encadrement des jeunes filles en situation difficile. La majorité de ses filles avaient été abandonnées par leurs propres parents et par la société et n’ont pas eu la chance d’être scolarisées et d’autres ont abandonné le chemin de l’école suite à la pauvreté de leur famille ou à l’insécurité dans leurs milieux d’origine.

Signalons que ce centre a été créé par les sœurs Dorothée de Cemo, qui avaient comme objectif l’encadrement des filles désœuvrées, mais, à la suite des évènements dus à la guerre, le centre Nyota a été repris par des Laïcs mais qui avaient compris le charisme des Sœurs fondatrices.

Vers 1997, puisque le centre Nyota avait été pillé par les personnes de mauvaise foi, les Sœurs avaient abandonné le centre Nyota.

Les filles accompagnées par le centre Nyota ont un âge qui varie entre 12 et 30 ans. Elles sont vulnérables, certains ont vécus des violences sexuelles, et quelques-unes, encore mineures, ont eu un enfant.  Après la formation, le centre Nyota leur  donne un kit complet composé des machines, pédales et quelques matériels pouvant leurs permettre de créer une activité génératrice de revenu. 

La Directrice a fini en remerciant le Père Bernard Ugeux et son réseau Germes d’Espérance qui appuie financièrement ce centre.

Destin Byandike Kad.

lundi 13 septembre 2021

Problèmes liés à l’environnement (un débat avec les organisations environnementales et les leaders locaux au Sud-Kivu.) (13 sept.2021)

 

Ce dimanche 12 septembre 2021, plusieurs organisations œuvrant dans la conservation de l’environnement au Sud-Kivu, les responsables des communautés ecclésiales vivantes (C.E.V) ainsi que quelques jeunes venus des différents quartiers de la ville de Bukavu et ailleurs réunis dans le réseau MEPE (Mouvement pour l’Education à la Paix et l’Environnement) ont organisé une séance de réflexion autours de questions environnementales dans la salle de la Bibliothèque Francisco du Foyer Ek’Abana accès sur les différents problèmes liés à l’environnement.

A en croire certains jeunes qui ont pris part à la rencontre, ils témoignent leur satisfaction et se disent être déterminés à continuer les sensibilisations pour une prise de conscience dans leurs familles.

Selon ELIYA CANIKIRE Moise, élève de 6ème année, se dit être fière du travail que fait le Mouvement pour l’Education à la Paix et l’Environnement.

Il poursuit en disant qu’il a été édifié sur les techniques de la gestion des déchets dans les ménages avec la technique d’utilisation de 4 sortes des poubelles dont la rouge, jaune, bleue, verte avec ses différents rôles.

Il pense que la me-gestion de déchets dans nos ménages serait à la base aujourd’hui des plusieurs maladies des mains sales à l’occurrence le choléra, la diarrhée etc. mais aussi cela pollue fortement l’aire que nous respirons.


Signalons que la ville de Bukavu, fait partie aujourd’hui des villes en RDC qui connaissent des sérieux problèmes liés à l’environnement et surtout la mégestion des déchets en plastique et autres.



Destin Byandike kad.

lundi 6 septembre 2021

Pour que l’exclusion ethnique ou culturelle ne soit plus une fatalité… (06 sept. 2021)

 


Une des raisons principales des tensions meurtrières en Afrique centrale est la pratique largement répandue de l’exclusion ethnique. La formation des religieux veut prévenir ces divisions.

On sait que la situation dans la région des Grands Lacs est encore marquée par des conflits ethniques qui ont entraîné de graves violences.  Elles ont laissé partout de profondes traces. Or, malgré des efforts louables et généreux,  les exclusions se poursuivent, qu’elles soient matérielles (affrontements armés) ou structurelles (refus de la liberté d’expression ou exclusion de la participation au pouvoir). C’est le résultat d’une longue histoire marquée par l’ethnocentrisme – favorisé parfois par la colonisation – qui a contaminé les Eglises elles-mêmes. Tout cela repose sur le refus – ou l’incapacité - d’accepter l’autre avec sa différence, de considérer l’altérité comme source d’enrichissement et non comme une menace pour sa propre identité. Notons que cette difficulté à honorer la différence se retrouve aussi dans des pays dits plus « évolués » comme les démocraties occidentales. L’incapacité ou  le refus d’accueillir l’étranger et de partager volontairement sa richesse avec lui, et aussi de s’enrichir de lui,  donne un spectacle navrant aux nations du Sud. L’histoire de l’humanité montre cependant qu’il est utopique d’empêcher un flux migratoire massif et que la seule façon de le gérer est de négocier avec les groupes en présence en vue de respecter toutes les identités concernées. Cela demande du temps et de la générosité. Ce dont manque parfois dramatiquement l’Occident…

J’ai l’occasion de donner des sessions d’initiation au vivre ensemble entre cultures différentes, en plusieurs points du Congo, au Burundi, au Burkina Faso, etc. Un des fruits de la catholicité est  la création et la présence de congrégations internationales à travers toute l’Afrique, importées ou nées sur place. Leur existence représente à la fois un défi et une espérance. Une espérance car elles sont appelées à être des laboratoires d’expérimentation d’une mondialisation vécue positivement grâce à l’accueil des différences au quotidien. Un défi quand les jeunes en formation dans une congrégation internationale – et parfois nationale -  sont invités à construite une communauté fraternelle authentique alors qu’ils descendent parfois des bourreaux et des victimes des violences perpétrées dans leurs pays d’origine. Déjà avant ces événements, il existait de nombreuses représentations de l’autre chargées de clichés non critiqués. Mais en outre, ils sont les dépositaires de mémoires blessées et d’identités meurtries ou meurtrières.

Lors des remontées de travaux de groupe dans le cadre d’une session réunissant une demi-douzaine de congrégations de diverses origines ethniques ou nationales, ce qui frappait d’emblée, c’était la découverte de la pleine humanité de l’« autre ». C’est aussi la prise de conscience du nombre de valeurs profondes que les participants ont en commun (accueil, solidarité, hospitalité), même si la façon de les vivre ou de les ritualiser au quotidien est différente. Ils ont réalisé alors que sous la diversité des traditions, il y a l’humanité profonde de tout être humain. Toute culture essaie de répondre à certaines questions de fond comme : qui sommes-nous ? D’où venons-nous ? Où allons-nous ? Il n’existe pas de vie humaine qui n’ait expérimenté  un jour positivement ou négativement les grands événements de la vie que sont l’amour, la fragilité, la mort, le conflit et la réconciliation. Ils ont réalisé qu’en tenant mieux compte de leur héritage commun d’humanité, ils peuvent dépasser – en les respectant ou en les négociant – les aspects de la vie quotidienne qui, dans les petites choses, heurtent leur sensibilité.

Vivre la pluriculturalité dans une dynamique d’interculturalité, c’est découvrir sa propre identité, la richesse de la diversité humaine dans les cultures et les religions  du monde et devenir acteurs d’une mondialisation respectueuse des différences. Car la mondialisation interroge la vie religieuse et parfois interpelle les conseils évangéliques. Comment un jeune d'aujourd'hui qui s’inscrit dans la dynamique de la mondialisation peut-il opter de façon positive – et non comme un refuge – pour la chasteté, la pauvreté et l’obéissance ? Voilà aussi un des thèmes de plus en plus souvent traités ces jours-ci dans la formation des jeunes religieux… Et quelle joie quand une foule immense assiste aux vœux perpétuels de trois jeunes carmélites d’origines culturelles différentes, dans la cathédrale de Bukavu. A cause de son expérience bimillénaire de la catholicité – et dans la mesure où celle-ci n’est pas confondue avec l’uniformité, comme c’est encore parfois le cas – l’Eglise devient signe et source d’une universalité créatrice au service de la justice, de la réconciliation et de la paix.

 

Kinshasa-Kigali, un accord entre Etats mais loin d’être endossé par les groupes rebelles.

  Pour une paix durable à l’Est du pays, faudra-t-il un arrangement entre Etats ? Ou alors une harmonisation avec les groupes rebelles ? S’i...