Chères
amies, chers amis,
La
fin de l’été approche et déjà les enfants ont rejoint leurs
écoles et les étudiants se préparent à retourner dans leurs Facs
ou autres grandes écoles. Cela signifie aussi que pour nombre
d’entre vous qui sont grands-parents…
c’est aussi la rentrée, avec tout ce qui vous sera demandé pour
les petits-enfants qui vous sont confiés
à divers moments. J’espère que vous avez passé un bel été et
que n’avez pas trop souffert de la canicule (pour mes
correspondants d’Europe).
Pour
moi aussi, c’est la reprise, à Rome avec les sessions pour les
anciens Pères et Sœurs missionnaires. J’y arrive en forme après
des vacances inhabituellement longues car je devais passer des
contrôles médicaux et subir des soins dentaires plus importants.
Tout va bien. Cela a été l’occasion de rencontrer beaucoup d’amis
et de soutiens à Germes d’Espérance, y compris des communautés
monastiques. Un grand merci pour votre accueil si chaleureux, pour
votre hospitalité généreuse et pour votre amitié. J’ai eu des
moments de vrais repos.
Le Touquet à la vesprée |
J’ai
eu l’occasion d’enregistrer des émissions radio à Toulouse et à
Lyon, entre autres pour présenter mon livre sur le Cardinal
Lavigerie que vous avez peut-être (?) acheté et lu…
Durant
l’été, j’ai reçu les rapports de l’année scolaire des deux
institutions soutenues par Germes d’espérance. Pour le centre
Nyota, pour la première fois, les élèves de couture ont passé un
jury national avec 22 sur 24 réussites. Pour les autres qui ont
passé le jury de fin d’études primaires, il y a 77% de succès.
Quant aux apprentis menuisiers de Kamituga, 37 sur 40 ont été
reçus. Ils partent avec un petit kit de menuisier pour commencer
leur vie professionnelle. Quand
on considère de quel milieu et de quelles situations
socio-économiques et humanitaires viennent ces jeunes, on ne peut
que se réjouir pour tous ceux et celles qui deviennent ainsi
progressivement autonomes
(voir photo p.3). Je suis très reconnaissant à mes collaborateurs
qui sont si généreux et dévoués. Grâce à vous, chaque mois, ils
sont 18 à recevoir leur salaire (bien trop modeste).
Tout
cela entretient l’espérance dans un pays qui continue à essayer
de s’en sortir malgré de graves dysfonctionnements.
Sept
mois après l’élection présidentielle, on a enfin un
gouvernement… de 66 ministres, après d’âpres négociations
alors, que la majorité des postes sont revenus aux partisans du
Président
sortant qui garde un contrôle important sur les activités
politiques et surtout économiques. Le nouveau Président prend des
initiatives prometteuses,
comme la gratuité de l’enseignement primaire. Tous espèrent qu’il
en aura les moyens financiers alors que cette gratuité est inscrite
dans la constitution depuis de très nombreuses années mais ignorée
par son prédécesseur. C’est d’autant plus nécessaire que les
familles restent très nombreuses et que toute la population fait
d’énormes efforts pour assurer la scolarisation des enfants. Cela
n’empêche qu’il y a beaucoup d’enfants non scolarisés dans
les rues… espérons qu’ils vont avoir leur chance maintenant.
La
RDC a été au centre de l’attention des médias (rares) qui
s’intéressent à l’Afrique. Le
Secrétaire Général de l’ONU, Antonio Guterres
vient de visiter la RDC et spécialement la région de Beni Butembo
et Goma où sévissent le plus de groupes
armés (on en compte 130 dans ces régions),
ainsi que le virus hémorragique Ebola.
En un an, celui-ci a fait plus deux mille morts dont 52 rien que pour
la semaine dernière. Il est très contagieux et on essaie de
sensibiliser la population (cf. mon dernier post sur mon blog). Il y
a un important soutien financier et médical international, il existe
un vaccin (200.000 vaccinés) et deux molécules curatives
prometteuses (plus de 800 personnes guéries). Guterres a promis un
renforcement des casques bleus pour combatte les groupes armés
(c’est dejà la plus grande opération de l’ONU actuellement avec
environ 18.000 hommes) et fait appel à l’aide internationale pour
lutter contre Ebola. Il y a des dons qui viennent de partout. En plus
de l’insécurité, la faiblesse du réseau sanitaire et le manque
d’eau dans les grandes villes ne sont pas favorables à une
prévention efficace, alors que la population devient plus consciente
du danger. Ils sont prêts à se laver les mains plus souvent, mais
s’il faut faire 5 km pour avoir de l’eau, comme dans certains
quartiers de Goma… Les défis sont très importants.
Le
FMI s’est aussi penché sur la RDC, maintenant
qu’il y a une forme d’alternance et un nouvel espoir de relance
économique. La commission qui doit faire des propositions de soutien
financier a d’abord évalué la situation du pays. Sa conclusion,
c’est qu’il faut d’abord , après tant d’années de gabegie,
redresser
« les dépenses et recettes fiscales, le secteur minier, la
lutte contre la corruption, la transparence et la gouvernance »…
Rien que cela ! Je crains que cela prenne pas mal de temps avant
qu’on reçoive le moindre fonds. Mais il y a des signes d’espoir.
Parmi
ceux-ci, il y a de belles initiatives des Eglises et de la société
civile. Par exemple, à l’initiative du prix Nobel le Dr Mukwege,
la création d’un fond mondial pour les victimes de violences
sexuelles. Déjà l’Allemagne et la Grande-Bretagne ont annoncé
des fonds. Il
y a la création, il y a plus d’un an, d’un Institut Supérieur
pour la Paix et la Réconciliation (ISPR) par les évêques des pays
des Grands Lacs
(Burundi, Rwanda et Est de la RDC). Il formera des chrétiens en vue
d’initiatives de médiation et de réconciliation. J’ai commencé
à y participer. De même que je participe à un réseau qui vient
d’être créé par un collègue protestant allemand avec qui j’ai
collaboré au Conseil Œcuménique des Eglises. Il sera œcuménique
et couvrira les pays de la région des Grands Lacs. Il vise à
partager les expériences de paix et de réconciliation de terrain, à
former des acteurs locaux et à poursuivre une réflexion académique
sur les défis de la réconciliation dans cette zone de conflit. Je
trouve cela très stimulant. Au mois de mai, j’étais invité par
la coopération Suisse à des journées d’étude à Kigali
(capitale du Rwanda) sur l’utilisation et la promotion d’une
méthode a visée thérapeutique basées sur une prise en charge
psychosociale et communautaire des personnes et des groupes
traumatisés par des conflits. Ce projet est né au Rwanda mais se
développe au Burundi et au Sud-Kivu où je vis. Ces différentes
instances me permettent d’approfondir ma propre pratique d’accueil
sur le terrain et de développer de la recherche sur les plans
méthodologiques et même académiques.
C’est
dans ce même esprit que j’organise avec une équipe, en lien avec
la Commissions Justice et Paix de l’Union Internationale des
Supérieures Générales (UISG, Rome) un
atelier de formation pour des personnes qui sont engagées sur le
terrain dans l’accueil et la réintégration des survivantes de
traumatismes dus à des conflits armés.
Je suis arrivé à obtenir 75 % des fonds nécessaires. J’espère
pouvoir compléter car l’enjeu est essentiel pour disposer
d’acteurs bien formés à la gestion des victimes des conflits,
enfants et adultes. Vous l’avez lu plus haut, il y a encore 130
groupes armés dans l’Est de la RDC et les femmes et les enfants
restent les premières cibles, les centres d’accueil ne
désemplissent pas.
Peinture
réalisée par une membre de l’association « Les
survivantes ». Espoir d’en sortir… purifiée ?
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Avec
toute mon amitié, Bernard