Chères
amies, chers amis,
Une
fois n’est pas coutume, aujourd’hui je vous écris de France où
je suis arrivé il y a quelques jours pour donner une retraite à mes
confrères dans la région parisienne. J’arrivais de Belgique où
j’avais également donné une retraite à des confrères, surtout
âgés, dans le nord du pays. Ce
sont des moments forts pour moi, et je crois pour eux, où nous
prenons le temps de faire silence durant huit jours pour nous mettre
à l’écoute de ce qui vibre et peine dans nos profondeurs et nous
relier à la source de l’Amour et de la Paix.
J’en profite autant que ceux qui les suivent. J’y vis aussi
l’arrivée de l’été, où je passe d’un rythme où il fait
sombre toute l’année vers 18h15, aux journées les plus longues de
l’été ici avec un soleil qui se couche autour de 22h… quel
contraste, aussi pour mon organisme !
Des
visages et des cœurs
J’ai
envie de consacrer une partie de cette lettre à des visages de
personne avec qui je travaille ou que nous avons prises en charge
grâce au soutien de Germes d’Espérance, que certains d’entre
vous continuent à soutenir.
C’est
elle-même qui a cousu sa robe.
Un
pays en grand chambardement
La
capacité de résilience qui se reflète sur ces visages ne nous
fait pas oublier que notre
pays est entré dans une crise grave.
Il y a quelques jours, Kofi Annan (ex-secrétaire général de l’ONU)
et neuf anciens chefs d’état africains ont lancé un cri d’alarme
au président de la République du Congo pour qu’il applique les
accords signés avec l’opposition afin de préparer les élections.
Or, depuis un an, comme par hasard, la rébellion d’une ethnie dont
le chef traditionnel a été assassiné par l’armée a embrasé
le centre du pays.
Elle
a contaminé cinq provinces,
provoqué plus de 3000 morts selon les évêques, et au moins 42
fosses communes. Elle a provoqué le déplacement de plus d’un
million de personnes qui survivent dans des conditions dramatiques.
Ce serait la brutalité inouïe des forces de l’ordre qui en serait
la cause. L’ONU essaie d’enquêter mais rencontre beaucoup
d’entraves sur le terrain. En parallèle, en un mois, il y a eu des
évasions
massives dans quatre prisons du pays,
dont la plus importante de Kinshasa, libérant plusieurs milliers
d’individus dont certains très dangereux, entre autres ceux
condamnés pour viol. C’est une menace inquiétante pour les
victimes de ces violences que nous encadrons et essayons de
réintégrer dans la vie courante.
Des
rumeurs persistantes accusent les autorités de provoquer et soutenir
ces désordres en vue de rendre impossibles les élections prévues
officiellement pour la fin de cette année. Elle s’appuie sur le
mépris des engagements pris fin décembre par le gouvernement
vis-à-vis du peuple et sous l’égide de la Conférence Episcopale
Nationale du Congo selon lesquels le président sortant ne briguerait
pas un illégal troisième mandat, ne convoquerait pas de
référendum, et le nouveau gouvernement compterait un premier
ministre de l’opposition tandis que les élections auraient enfin
lieu fin 2017, avec un an de retard.
La
pagaille actuelle qui se généralise dans plusieurs coins du pays
obligerait de reporter les élections. Tout
cela reste à prouver,
alors que l’insécurité politique croissante s’ajoute au marasme
économique à la suite de la dévaluation
du franc congolais.
En quelques mois, le dollar est passé de 950 à 1450 francs
congolais. Comme le pays importe une bonne partie de sa nourriture et
de ses biens de consommation, les petites commerçants - dont
certaines familles que nous soutenons – ne savent plus où donner
de la tête. Frustration et inquiétudes grandissent partout.
Les
collaborateurs privilégiés de Germes d’espérance
Notre
action sur le terrain n’est possible que grâce à des
collaborateurs irremplaçables. Beaucoup de situations de détresse
ne peuvent être gérées que par des nationaux qui peuvent mener les
enquêtes dans les quartiers et qui connaissent bien la mentalité
des gens. Parmi ceux-ci, il y a Madame
Noella Kadayi
mère de famille nombreuse et directrice du Centre Nyota qui
accueille en journée et éduque actuellement 279 victimes, jeunes
filles et enfants afin de les réinsérer. Gestionnaire et
confidente, elle tient le premier rôle dans ce projet.
Il
y a aussi Bienvenu
Karume,
diplômé de l’Institut Supérieur de Développement Rural de
Bukavu et qui nous aide dans le suivi des familles que nous avons
secourues dans la rue et qui sont en voie de réinsertion (dont des
jeunes filles enlevées comme esclaves sexuelles). Il connaît
parfaitement le milieu et la mentalité et est d’une grande
probité. Il y a enfin M.
Noël Cikuru,
directrice de l’ONG Action d’Espoir, qui réinsère dans leur
milieu des femmes victimes de violences. Ses conseils nous sont
précieux. Sans leur collaboration, à laquelle s’ajoute votre
soutien matériel, Germes d’espérance ne rencontrerait pas les
beaux résultats dont je vous parle régulièrement.
Bel
été à toutes et à tous et encore merci ! Bernard