lundi 26 juin 2017

Lettre N°30, du 21 juin 2017


Chères amies, chers amis,
Une fois n’est pas coutume, aujourd’hui je vous écris de France où je suis arrivé il y a quelques jours pour donner une retraite à mes confrères dans la région parisienne. J’arrivais de Belgique où j’avais également donné une retraite à des confrères, surtout âgés, dans le nord du pays. Ce sont des moments forts pour moi, et je crois pour eux, où nous prenons le temps de faire silence durant huit jours pour nous mettre à l’écoute de ce qui vibre et peine dans nos profondeurs et nous relier à la source de l’Amour et de la Paix. J’en profite autant que ceux qui les suivent. J’y vis aussi l’arrivée de l’été, où je passe d’un rythme où il fait sombre toute l’année vers 18h15, aux journées les plus longues de l’été ici avec un soleil qui se couche autour de 22h… quel contraste, aussi pour mon organisme !
Des visages et des cœurs
J’ai envie de consacrer une partie de cette lettre à des visages de personne avec qui je travaille ou que nous avons prises en charge grâce au soutien de Germes d’Espérance, que certains d’entre vous continuent à soutenir.




C’est elle-même qui a cousu sa robe.
Un pays en grand chambardement
La capacité de résilience qui se reflète sur ces visages ne nous fait pas oublier que notre pays est entré dans une crise grave. Il y a quelques jours, Kofi Annan (ex-secrétaire général de l’ONU) et neuf anciens chefs d’état africains ont lancé un cri d’alarme au président de la République du Congo pour qu’il applique les accords signés avec l’opposition afin de préparer les élections. Or, depuis un an, comme par hasard, la rébellion d’une ethnie dont le chef traditionnel a été assassiné par l’armée a embrasé le centre du pays. Elle a contaminé cinq provinces, provoqué plus de 3000 morts selon les évêques, et au moins 42 fosses communes. Elle a provoqué le déplacement de plus d’un million de personnes qui survivent dans des conditions dramatiques. Ce serait la brutalité inouïe des forces de l’ordre qui en serait la cause. L’ONU essaie d’enquêter mais rencontre beaucoup d’entraves sur le terrain. En parallèle, en un mois, il y a eu des évasions massives dans quatre prisons du pays, dont la plus importante de Kinshasa, libérant plusieurs milliers d’individus dont certains très dangereux, entre autres ceux condamnés pour viol. C’est une menace inquiétante pour les victimes de ces violences que nous encadrons et essayons de réintégrer dans la vie courante.
Des rumeurs persistantes accusent les autorités de provoquer et soutenir ces désordres en vue de rendre impossibles les élections prévues officiellement pour la fin de cette année. Elle s’appuie sur le mépris des engagements pris fin décembre par le gouvernement vis-à-vis du peuple et sous l’égide de la Conférence Episcopale Nationale du Congo selon lesquels le président sortant ne briguerait pas un illégal troisième mandat, ne convoquerait pas de référendum, et le nouveau gouvernement compterait un premier ministre de l’opposition tandis que les élections auraient enfin lieu fin 2017, avec un an de retard.
La pagaille actuelle qui se généralise dans plusieurs coins du pays obligerait de reporter les élections. Tout cela reste à prouver, alors que l’insécurité politique croissante s’ajoute au marasme économique à la suite de la dévaluation du franc congolais. En quelques mois, le dollar est passé de 950 à 1450 francs congolais. Comme le pays importe une bonne partie de sa nourriture et de ses biens de consommation, les petites commerçants - dont certaines familles que nous soutenons – ne savent plus où donner de la tête. Frustration et inquiétudes grandissent partout.

Les collaborateurs privilégiés de Germes d’espérance
Notre action sur le terrain n’est possible que grâce à des collaborateurs irremplaçables. Beaucoup de situations de détresse ne peuvent être gérées que par des nationaux qui peuvent mener les enquêtes dans les quartiers et qui connaissent bien la mentalité des gens. Parmi ceux-ci, il y a Madame Noella Kadayi mère de famille nombreuse et directrice du Centre Nyota qui accueille en journée et éduque actuellement 279 victimes, jeunes filles et enfants afin de les réinsérer. Gestionnaire et confidente, elle tient le premier rôle dans ce projet.

Il y a aussi Bienvenu Karume, diplômé de l’Institut Supérieur de Développement Rural de Bukavu et qui nous aide dans le suivi des familles que nous avons secourues dans la rue et qui sont en voie de réinsertion (dont des jeunes filles enlevées comme esclaves sexuelles). Il connaît parfaitement le milieu et la mentalité et est d’une grande probité. Il y a enfin M. Noël Cikuru, directrice de l’ONG Action d’Espoir, qui réinsère dans leur milieu des femmes victimes de violences. Ses conseils nous sont précieux. Sans leur collaboration, à laquelle s’ajoute votre soutien matériel, Germes d’espérance ne rencontrerait pas les beaux résultats dont je vous parle régulièrement.
Bel été à toutes et à tous et encore merci ! Bernard

Kinshasa-Kigali, un accord entre Etats mais loin d’être endossé par les groupes rebelles.

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