Cher(e)s, ami(e)s,
C’est avec des notes optimistes que je vous envoie cette nouvelle Lettre qui vous rejoint à la naissance de l’été dans votre hémisphère. Qu’il soit une occasion de repos, de détente au cœur d’une morosité ambiante qui semble s’enraciner chez vous. Nous suivons les soubresauts de Trump, du Brexit et de vos guérillas urbaines grâce à nos antennes paraboliques.
Un fécond Chapitre Général
Je viens de rentrer de Rome où j’ai eu l’occasion de participer à notre Chapitre Général du 13 mai au 13 juin en tant qu’animateur spirituel. Notre Chapitre réunit tous les six ans des représentants de la hiérarchie de la Société ainsi que des membres élus, en majorité, afin de faire le point sur la mission de notre Société. Ils étaient quarante-quatre délégués de quatre continents et d’une moyenne d’âge bien plus jeune que celle de l’ensemble de notre congrégation. Place aux jeunes !
Ce fut un temps riche en fraternité et en réflexion communautaire. Il concernait le bilan de notre travail missionnaire de ces six dernières années et les défis qui nous attendent pour les six prochaines… Ce qui est assez ambitieux vu la vitesse avec laquelle le monde, L’Église et notre propre Société changent ! Mais il nous faut rester attentif aux signes des temps et tâcher de les discerner. Quant au bilan, il a été réalisé dans le cadre d’une méthodologie appelée de « discernement appréciatif ». L’objectif était de construire l’avenir à partir d’un regard positif sur les meilleures réalisations du passé et du présent. Et celles-ci sont nombreuses et riches comme le reflétait le rapport du Conseil général sortant. Il y a beaucoup de raisons de rendre grâces malgré les inévitables imperfections. Plutôt que de recenser les problèmes récurrents qui nous alourdissent depuis pas mal d’années, nous avons considéré ce qui a été fécond et positif, lorsque nous étions le plus à la hauteur de notre vocation et de notre charisme, en vue d’exploiter ce capital pour aller plus loin et plus profond dans la poursuite de notre mission. Cela est d’autant plus important que nous vivons de multiples transitions au sein desquelles il est délicat de maintenir le cap. Je ne parle pas des défis stimulants et parfois inquiétants de la mondialisation, ni des étonnements de notre Église qui se fait bousculer par un Pape qui dérange car il prend l’Évangile au sérieux et est cohérent dans sa façon de le mettre en pratique. Mais de la transition que nous vivons dans notre Société entre, d’un côté un nombre décroissant mais toujours majoritaire de missionnaires d’origine occidentale, qui vieillissent rapidement alors qu’ils ont souvent encore pas mal de pouvoir. Et de l’autre un nombre croissant de jeunes confrères qui viennent d’Afrique (et certains d’Asie et d’Amérique du Sud) qui font leurs premières expériences de prises de responsabilité dans une Afrique en profonde mutation. Et enfin, l’espérance et le défi que représentent près de 500 jeunes en formation pour une Société missionnaire qui compte moins de 1200 membres d’un âge moyen élevé.
Un nouveau Conseil général
Une des expressions de cette transition est l’élection du nouveau Conseil général de cinq membres dont le Supérieur général est un de mes anciens étudiants à Toulouse, le Père Stan Lubungo, Zambien, entouré d’une équipe qui a une moyenne d’âge de près de 50 ans. Sa composition me réjouit car les confrères élus sont des hommes qui ont de l’expérience – même jeunes !, et de la sagesse – qui n’attend pas le nombre des années. Ils sont issus de trois continents sur quatre. Ils ont pour tâche de mettre en pratique ce que nous avons décidé pour l’avenir sous la forme d’une série de plans stratégiques qui allient espérance et propositions concrètes. Il y est question de la vie spirituelle, de la vie communautaire, de la formation initiale et permanente (dont je suis responsable avec une équipe), de la gestion financière et de la formation de bons gestionnaires, de nos engagements humains et missionnaires.
Des défis à relever
Notre mission concerne plusieurs domaines sensibles, en dehors ou dans le cadre des paroisses, où les enjeux sont de plus en plus cruciaux dans le monde d’aujourd’hui. Il y a l’engagement pour la justice et la paix alors que nous travaillons souvent dans des zones marquées par la violence, tant en Afrique qu’au sein de populations africaines vivant hors d’Afrique. Il y a ensuite la rencontre et le dialogue, prioritairement avec les musulmans et l’islam – que l’islamisme a corrompu – ainsi qu’avec les religions traditionnelles africaines, les autres dénominations chrétiennes (avec une efflorescence d’« églises » syncrétistes sectaires), ainsi que les milieux laïcs et athées, attirés par certaines évolutions éthiques problématiques d’Occident, etc. A cela s’ajoute un espace auquel nous attachons de plus en plus d’importance, celui des médias et des réseaux sociaux qui envahissent l’Afrique pour le meilleur et, souvent, pour le pire (contenu de l’information souvent manipulé par les États et médiocrité des programmes, dont certains posent des problèmes éthiques). Nous avons aussi considéré le défi des migrants en Afrique même et ailleurs, où tant d’Africains ont besoin d’être accueillis par des gens qui connaissent leur culture. Et aussi les personnes laissées pour compte que le Pape François appelle les « périphéries existentielles ». C’est là que l’on retrouve les victimes des violences dont je m’occupe à Bukavu avec votre soutien si précieux. J’ajouterais un dernier domaine dont il a été beaucoup question ces derniers temps dans L’Église : la protection des personnes vulnérables. A la demande du Vatican, dans tous nos secteurs géographiques, il existe un confrère délégué à ce domaine. Or j’ai été sollicité pour participer à leur formation avec le confrère qui s’y est spécialisé, Stéphane Joulain, Français. Je collaborerai avec lui tout prochainement à l’animation de sessions pour ces confrères dans le cadre d’un programme créé par les Jésuites de la Faculté de Psychologie de l’Université Pontificale Grégorienne (Rome). Il s’agit de présenter les enjeux, les contextes, des outils de discernement et d’intervention sur différents plans : anthropologique, psychologique, canonique, etc. Ce programme est stimulant et j’ai hâte de l’expérimenter prochainement à Nairobi.
D’autres « notes optimistes »
Je n’ai pas l’intention de concurrencer l’année jubilaire de la miséricorde, mais j’ai eu l’occasion de jubiler et rendre grâce au Seigneur pour deux anniversaires qui m’ont tenu à cœur. Il y a eu tout d’abord mes 70 ans, le 19 mai. J'ai rendu grâce pour le don de la vie et pour mes parents et ma famille. J'ai aussi remercié pour tout l'amour que j'ai reçu à profusion durant ma vie et que j'essaie de partager là où je suis missionnaire. J’ai aussi voulu remercier vie Facebook tous celles et ceux qui ont été proches de moi dans les épreuves et demander pardon à celles et ceux que j'ai pu blesser un jour. J’ai reçu beaucoup de beaux messages alors que j’étais à Rome pour notre Chapitre.
Et puis il y a eu hier, la célébration de mes 40 ans d’ordination. C’était à la Paroisse du Précieux Sang à Uccle (Bruxelles). En cette époque contestataire j’avais eu l’audace de proposer à l’évêque (le Recteur de l’Université de Louvain) de présenter un témoignage plutôt que son homélie. Cela a dû l’arranger ou lui a plu car il a accepté sans problème. J’avais osé dire ce jour-là : « Je crois que Dieu est assez grand pour combler la vie d’un homme ». Après 40 ans, je dirais : « Je sais que Dieu est assez grand pour combler la vie d’un homme », et ce malgré toutes les épreuves ainsi que les balbutiements de la foi. Je suis heureux d’être prêtre, missionnaire et de travailler en Afrique dans une zone sinistrée par la violence endémique. Car c’est là aussi que se déploie le plus de solidarité et que se révèle ce qu’il y a de plus profond dans un cœur humain : la capacité d’aimer et d’être bon. Je rends donc grâce à Dieu pour ce lieu exposé à la beauté comme à la laideur, mais où la foi dans la vie et en Dieu l’emporte.
Enfin, si je puis mener des projets ici à Bukavu, auprès des « périphéries existentielles » à côté de mon travail de formateur, c’est parce qu’il y a des amis comme vous qui croient dans ce que nous faisons et sont prêts à renoncer à certains plaisir (et parfois à bien plus !) pour offrir un avenir aux oubliés de l’histoire. Merci donc encore de tout cœur de me donner la joie de faire naître tant de sourires sur les lèvres et dans les yeux de celles et ceux auprès desquels je suis engagé avec vous. A vous de tout cœur, avec gratitude, Bernard
C’est avec des notes optimistes que je vous envoie cette nouvelle Lettre qui vous rejoint à la naissance de l’été dans votre hémisphère. Qu’il soit une occasion de repos, de détente au cœur d’une morosité ambiante qui semble s’enraciner chez vous. Nous suivons les soubresauts de Trump, du Brexit et de vos guérillas urbaines grâce à nos antennes paraboliques.
Un fécond Chapitre Général
Je viens de rentrer de Rome où j’ai eu l’occasion de participer à notre Chapitre Général du 13 mai au 13 juin en tant qu’animateur spirituel. Notre Chapitre réunit tous les six ans des représentants de la hiérarchie de la Société ainsi que des membres élus, en majorité, afin de faire le point sur la mission de notre Société. Ils étaient quarante-quatre délégués de quatre continents et d’une moyenne d’âge bien plus jeune que celle de l’ensemble de notre congrégation. Place aux jeunes !
Ce fut un temps riche en fraternité et en réflexion communautaire. Il concernait le bilan de notre travail missionnaire de ces six dernières années et les défis qui nous attendent pour les six prochaines… Ce qui est assez ambitieux vu la vitesse avec laquelle le monde, L’Église et notre propre Société changent ! Mais il nous faut rester attentif aux signes des temps et tâcher de les discerner. Quant au bilan, il a été réalisé dans le cadre d’une méthodologie appelée de « discernement appréciatif ». L’objectif était de construire l’avenir à partir d’un regard positif sur les meilleures réalisations du passé et du présent. Et celles-ci sont nombreuses et riches comme le reflétait le rapport du Conseil général sortant. Il y a beaucoup de raisons de rendre grâces malgré les inévitables imperfections. Plutôt que de recenser les problèmes récurrents qui nous alourdissent depuis pas mal d’années, nous avons considéré ce qui a été fécond et positif, lorsque nous étions le plus à la hauteur de notre vocation et de notre charisme, en vue d’exploiter ce capital pour aller plus loin et plus profond dans la poursuite de notre mission. Cela est d’autant plus important que nous vivons de multiples transitions au sein desquelles il est délicat de maintenir le cap. Je ne parle pas des défis stimulants et parfois inquiétants de la mondialisation, ni des étonnements de notre Église qui se fait bousculer par un Pape qui dérange car il prend l’Évangile au sérieux et est cohérent dans sa façon de le mettre en pratique. Mais de la transition que nous vivons dans notre Société entre, d’un côté un nombre décroissant mais toujours majoritaire de missionnaires d’origine occidentale, qui vieillissent rapidement alors qu’ils ont souvent encore pas mal de pouvoir. Et de l’autre un nombre croissant de jeunes confrères qui viennent d’Afrique (et certains d’Asie et d’Amérique du Sud) qui font leurs premières expériences de prises de responsabilité dans une Afrique en profonde mutation. Et enfin, l’espérance et le défi que représentent près de 500 jeunes en formation pour une Société missionnaire qui compte moins de 1200 membres d’un âge moyen élevé.
Un nouveau Conseil général
Une des expressions de cette transition est l’élection du nouveau Conseil général de cinq membres dont le Supérieur général est un de mes anciens étudiants à Toulouse, le Père Stan Lubungo, Zambien, entouré d’une équipe qui a une moyenne d’âge de près de 50 ans. Sa composition me réjouit car les confrères élus sont des hommes qui ont de l’expérience – même jeunes !, et de la sagesse – qui n’attend pas le nombre des années. Ils sont issus de trois continents sur quatre. Ils ont pour tâche de mettre en pratique ce que nous avons décidé pour l’avenir sous la forme d’une série de plans stratégiques qui allient espérance et propositions concrètes. Il y est question de la vie spirituelle, de la vie communautaire, de la formation initiale et permanente (dont je suis responsable avec une équipe), de la gestion financière et de la formation de bons gestionnaires, de nos engagements humains et missionnaires.
Des défis à relever
Notre mission concerne plusieurs domaines sensibles, en dehors ou dans le cadre des paroisses, où les enjeux sont de plus en plus cruciaux dans le monde d’aujourd’hui. Il y a l’engagement pour la justice et la paix alors que nous travaillons souvent dans des zones marquées par la violence, tant en Afrique qu’au sein de populations africaines vivant hors d’Afrique. Il y a ensuite la rencontre et le dialogue, prioritairement avec les musulmans et l’islam – que l’islamisme a corrompu – ainsi qu’avec les religions traditionnelles africaines, les autres dénominations chrétiennes (avec une efflorescence d’« églises » syncrétistes sectaires), ainsi que les milieux laïcs et athées, attirés par certaines évolutions éthiques problématiques d’Occident, etc. A cela s’ajoute un espace auquel nous attachons de plus en plus d’importance, celui des médias et des réseaux sociaux qui envahissent l’Afrique pour le meilleur et, souvent, pour le pire (contenu de l’information souvent manipulé par les États et médiocrité des programmes, dont certains posent des problèmes éthiques). Nous avons aussi considéré le défi des migrants en Afrique même et ailleurs, où tant d’Africains ont besoin d’être accueillis par des gens qui connaissent leur culture. Et aussi les personnes laissées pour compte que le Pape François appelle les « périphéries existentielles ». C’est là que l’on retrouve les victimes des violences dont je m’occupe à Bukavu avec votre soutien si précieux. J’ajouterais un dernier domaine dont il a été beaucoup question ces derniers temps dans L’Église : la protection des personnes vulnérables. A la demande du Vatican, dans tous nos secteurs géographiques, il existe un confrère délégué à ce domaine. Or j’ai été sollicité pour participer à leur formation avec le confrère qui s’y est spécialisé, Stéphane Joulain, Français. Je collaborerai avec lui tout prochainement à l’animation de sessions pour ces confrères dans le cadre d’un programme créé par les Jésuites de la Faculté de Psychologie de l’Université Pontificale Grégorienne (Rome). Il s’agit de présenter les enjeux, les contextes, des outils de discernement et d’intervention sur différents plans : anthropologique, psychologique, canonique, etc. Ce programme est stimulant et j’ai hâte de l’expérimenter prochainement à Nairobi.
D’autres « notes optimistes »
Je n’ai pas l’intention de concurrencer l’année jubilaire de la miséricorde, mais j’ai eu l’occasion de jubiler et rendre grâce au Seigneur pour deux anniversaires qui m’ont tenu à cœur. Il y a eu tout d’abord mes 70 ans, le 19 mai. J'ai rendu grâce pour le don de la vie et pour mes parents et ma famille. J'ai aussi remercié pour tout l'amour que j'ai reçu à profusion durant ma vie et que j'essaie de partager là où je suis missionnaire. J’ai aussi voulu remercier vie Facebook tous celles et ceux qui ont été proches de moi dans les épreuves et demander pardon à celles et ceux que j'ai pu blesser un jour. J’ai reçu beaucoup de beaux messages alors que j’étais à Rome pour notre Chapitre.
Et puis il y a eu hier, la célébration de mes 40 ans d’ordination. C’était à la Paroisse du Précieux Sang à Uccle (Bruxelles). En cette époque contestataire j’avais eu l’audace de proposer à l’évêque (le Recteur de l’Université de Louvain) de présenter un témoignage plutôt que son homélie. Cela a dû l’arranger ou lui a plu car il a accepté sans problème. J’avais osé dire ce jour-là : « Je crois que Dieu est assez grand pour combler la vie d’un homme ». Après 40 ans, je dirais : « Je sais que Dieu est assez grand pour combler la vie d’un homme », et ce malgré toutes les épreuves ainsi que les balbutiements de la foi. Je suis heureux d’être prêtre, missionnaire et de travailler en Afrique dans une zone sinistrée par la violence endémique. Car c’est là aussi que se déploie le plus de solidarité et que se révèle ce qu’il y a de plus profond dans un cœur humain : la capacité d’aimer et d’être bon. Je rends donc grâce à Dieu pour ce lieu exposé à la beauté comme à la laideur, mais où la foi dans la vie et en Dieu l’emporte.
Enfin, si je puis mener des projets ici à Bukavu, auprès des « périphéries existentielles » à côté de mon travail de formateur, c’est parce qu’il y a des amis comme vous qui croient dans ce que nous faisons et sont prêts à renoncer à certains plaisir (et parfois à bien plus !) pour offrir un avenir aux oubliés de l’histoire. Merci donc encore de tout cœur de me donner la joie de faire naître tant de sourires sur les lèvres et dans les yeux de celles et ceux auprès desquels je suis engagé avec vous. A vous de tout cœur, avec gratitude, Bernard
Wivine qui a pris en charge frères et sœur